Camille R - Ardèche (07)

 

À vous LEO et cheminants...

 

Me présenter à vous là par écrit, quel parcours !

Une part de moi heureuse d’avancer garde le cap, la curiosité d’explorer, elle se donne le temps... une autre se met en travers, en urgences, en désir de perfection. Me présenter sans me perdre (ni vous perdre ?) un vrai défi pour moi.

 

Me voilà avec l’envie de rencontrer davantage ce monde où vit Hélène (… Je suis aussi la mère d’Hélène :) Avec l’envie d’y baigner un temps, avec ce qui sera. En abandonnant ce désir impossible de réparer le passé (Il n'y a rien a réparer car tout est juste ??) découvrir, expérimenter, grandir encore un peu... Si des liens demeurent, que ce soient des liens qui ouvrent vers plus de liberté ?  

 

Expérimenter avec vous tous une relation où d’autres dimensions s’offrent à sentir, y trouver un ancrage supplémentaire pour avancer. Avec le désir d’être là présente avec toutes les pores de ma peau, curieuse de ce qui sera, que je le comprenne ou que ça me dépasse. C’est fou quand je réalise combien tout se tient, à des niveaux qui me dépassent. Quand je perçois des coïncidences. Ça redonne de la vie et de la fluidité là où tout était figé.

 

Merci la dernière video IDISI avec Catherine ! Je découvre une Catherine telle quelle sans chichis aucun, un cadeau sur mon chemin d’écritures. Je la vois s’accrocher dur avec son désir d’ «immortaliser » les fruits du jardin d’Hélène dans une « nature morte » :-) Dans ce parcours exigeant je trouve de la joie et l’énergie de la simplicité pour reprendre ma « présentation ».

…………

 

J’ai 67 ans, dont 42 ans de vie paysanne avec Alex dans les Cévennes ardéchoises après 3 années de travail en laboratoire de biologie (génétique) au CNRS.

Il y a 42 ans ma mère Christiane mourrait à 50 ans d’une tumeur au cerveau. Et mon père Frédéric quelques années plus tard, d’un cancer lui aussi. Pour moi mes parents avaient été là, sans être là. Une apparence de présence généreuse, mais je restais dans un vide immense. Une grande distance… on se touchait très peu.

 

De mon regard d’aujourd’hui, cette mère (bien que riche de compétences et de pétillements) est morte de n’avoir pu mener sa vie, tôt encombrée des souffrances tues et de la rigidité du devoir infusé en elle, notamment du devoir d’enfants… Enfants auxquels elle souriait du mieux qu’elle pouvait, par delà ses sacrifices. Drôle de sourire bien triste. Il me reste la sensation de ne l’avoir jamais rencontrée de son vivant… Pourtant il y a eu un basculement les dernières années de sa vie, où Christiane vers 45 ans a replongé vers ce qui l’animait et la questionnait.

A sa mort j’ai eu besoin de terre dans mes mains et sous mes pieds, et de chaleur animale toujours. Ca tombait bien, je venais de rencontrer Alex, fils de paysans Italiens, qui montait à Paris au salon de l’agriculture. Cet élan de rupture avec mon milieu conventionnel « petit bourgeois » m’a emmenée avec Alex en Ardèche, pays d’une partie de mes ancêtres. Un élan vers une vie où je serais vivante toute entière, pas que dans ma tête ! Où on pourrait re-penser et vivre un monde plus écologique, qui aurait du sens ?

 

Nous avons retapé une ferme à l’abandon en haut d’une montagne. Nous y avons accueilli nos 3 enfants Hélène, Sylvain, Anna « comme ils venaient » ; chats, chiens, chevaux, brebis sont arrivés, puis un grand troupeau d’ânes (sardes et provençaux, races anciennes)... sans compter poules et canards, et des stagiaires de tout poil. J’ai cultivé un beau jardin, des relations le plus souvent amicales avec les voisins. Alex a semé et planté des arbres (pommiers surtout), framboises, cassis, récolté des fleurs (sureau, roses) et monté un atelier de jus de fruits pour valoriser nos récoltes. Un équilibre inconscient régissait notre couple. Une femme beaucoup dans sa tête, un homme plus incarné dans son corps.

 

De cette période de ma vie de mère éleveuse-paysanne je garde une image déconcertante de jolie carte postale : je m’y rencontre trop souvent coupée de ma sensibilité, coupée des autres, coupée du monde, sans souvenirs. J’avais tenté de faire corps avec la terre, « de me frotter au rude de la matière pour mieux m’incarner »  mais j’étais restée enfermée dans ma tête : cet univers d’absence à soi-même qui était le mien derrière de belles apparences avait juste changé de cadre.

 

Les choses ont commencé à se retourner 15 ans plus tard, quand des difficultés importantes sont survenues avec nos enfants sans que je n’y comprenne rien. Des soucis, dans notre famille modèle ? Au sein de notre ferme si accueillante ? J’ai cherché la faille. La mienne ? Celle d’Alex ? Celle de nous deux, d’un équilibre défaillant ? (Alex avait tendance à disparaître, et moi à prendre le contrôle…) L’impuissance m’a envahit.

 

J’ai réalisé ensuite que ma grand-mère (paternelle) s’appelait Camille, qu’elle avait d’abord épousé Alexandre, qu’il y avait parmi ses enfants une petite Camille décédée la veille de ses 15 ans, une sœur Marthe enfermée en catimini dans un hôpital psychiatrique, un frère Frederic mort sur le front, etc...

J’ai découvert du côté d’Alex combien dans sa lignée les hommes se faisaient disparaître... Des tonnes de co-incidences et d’enfer-me-ment me sont apparus que je n’avais jamais vus jusques là. Les questions sont venues.  

 

Jusqu’où suis-je une marionnette, de qui, de quoi ? Qu’est-ce que je transmets à mes enfants, et au monde autour de moi ? Quelle marge de liberté me reste-t-il ?

Si je m’ouvre à plus de conscience, je respirerai mieux ?...et le monde aussi ??

Grâce à l’étouffement de plus en plus aigu qui m’enserrait, animée par le désir de comprendre et respirer mieux, j’ai pris à 50 ans le relai d’une ouverture que ma mère avait initiée.  

J'ai entrepris un travail de « Présence consciente dans la relation »  (à soi, aux autres, au monde) en gestalt et transpersonnel, où le non-verbal retrouve une grande place. Où des mémoires corporelles jaillissent parfois. Non, je n’ai plus à m’excuser d’exister ! Très lentement je recommence à pouvoir sentir. J’apprends à écouter, au-delà des mots. A percevoir peu à peu combien « mes manques à être » peuvent alourdir l’autre en face de moi. Et combien je projette sur cet autre, précieux et exaspérant miroir !

 

Je m’approche du grand vide qui m’habite. Qu’il est compliqué de permettre à l’élan de vie d’émerger ! Je découvre en moi plein de peurs qui me contraignent.

J’approche plus bousculant encore : le monde extérieur est en résonance avec mon monde intérieur ! Tout se tient ? ce ne sont pas que des mots ? Une autre dimension s’ouvre pour moi.

 

« Qu’y a-t-il de pire que d’avoir dansé toute une vie au bal des ombres, être resté à la surface des choses, sans jamais avoir été précipité dans une autre dimension ? » (Christiane Singer ;-)

 

J’avance plus au quotidien dans la relation de couple, avec les voisins, et avec chacun de nos 3 enfants… rudement confrontée à mes points sensibles. À mes points aveugles.

J’avance, avec la nécessité d’apprendre à me nourrir moi : pas facile.  

Je cherche comment tenir bon dans la confiance sans contrôler tout, alors que j’ai toujours eu besoin de tout sécuriser… Je me découvre trimballée par des forces et des ascendants qui toujours me dépassent.

 

Avec vous il y a de quoi expérimenter… et de quoi me questionner ! J’aimerais tant avoir des réponses sans me torturer la tête. Etre illuminée enfin ! (C'est le moi qui parle, celle pour qui tout est compliqué et qui attend d'être l'élue ?)… ou tout du moins éclairée par d’autres niveaux de conscience. Je lis dans vos parcours et témoignages, et dans mon parcours, que ce n’est pas  si simple…

 

Me revoilà, avec plus d’humilité. L’arrivée d’Oriel, notre petit fils trisomique, m’invite avec un beau sourire et plus de dépouillement dans ce sens là… Humilité, humus, retour à la terre fertile, avec une autre qualité de présence.

Ca décante. En moi, et à l’extérieur.

Sollicitée pour me confronter au vide, à l’absence, à toutes mes peurs, je commence à exister pour de vrai.  A être avec ce qui me dérange, au lieu de me blinder contre, ou de disparaître. Je commence à me sentir reliée aux plantes, aux animaux, aux gens, au monde. Au moment où la prédation s’accélère dans notre vieux monde en train de s’écrouler ?

«  Y’a urgence ! plus le temps ! Il est trop tard Camille ! » Cette oppression si puissante en moi se détend malgré les flèches qui viennent encore me brûler les poumons.

 

« Le temps naît entre vos mains si l’infini est dans votre coeur. Ainsi vous aurez le temps pour tout » dit Gitta Mallasz.

???

Ah j’ai encore bien du chemin à faire...

 

Bienvenue à vos retours s’ils se présentent  :-)

 

Camille R

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