20. Essence Amasutum - par Orsula

 

"On a des mots pour dire une peine légère,

mais les grandes douleurs ne savent que se taire."

Sénèque

 

Dans ce texte, je raconte notre dernière expérience qui m’a amenée à contacter une mémoire refoulée et nous a permis de comprendre le complexe araignée. Les rêves, les symptômes, les lectures et les compréhensions se sont chevauchés, mais pour exposer les faits avec un peu de clarté, j’ai adopté cette structure du récit.

 

L’expérience a débuté avec une question : quel est le rôle du masculin ? Dans cette quête, il semblerait que le féminin soit un élément clé pour dépasser nos programmes et évoluer vers une conscience plus unifiée. Cependant, le masculin n’avait-il pas une importance égale ?

 

 

Le masculin bloqué :

 

Pour répondre à cette question, la gardienne a initié l’expérience. Cette nuit-là, je dormais à côté de Lylia quand je me suis retrouvée ailleurs :

 

« Je surprends un échange entre la gardienne et Anas. Elle semble passer un marché avec lui et elle a besoin de son accord. Chose faite, nous nous retrouvons, elle et moi, dans une cellule. J’entoure la gardienne comme une aura, je capte ce qui se déroule, mais ce n’est pas moi qui agis.

 

L’homme enfermé est l’ancêtre de Anas que je perçois comme son grand-père. La gardienne demande à cet être son accord pour qu’elle puisse récupérer son sexe. Il accepte. Ainsi, elle se fait implanter cet attribut masculin.

 

Je me retrouve dans un autre espace, privé en quelque sorte, où nous échangeons toutes les deux. Je lui dis qu’étant donné l’âge avancé de ce grand-père, son sexe risque de ne pas fonctionner. Elle m’informe sans besoin de mots que ce n’est pas dans ce but qu’elle se l’est fait implanter.

 

Je suis un point qui perçoit et j’observe sa réalité. Les autres gardiens ont eu vent de sa manœuvre. Ils ne sont pas ravis. Ils ne montrent pas leur mécontentement, mais décident de lui faire payer son acte. Or, au moment de s’en prendre à elle, ils se sont pris à elle en moi.

 

Je suis alertée par un attouchement anal. Je me retrouve dans mon corps alors qu’il est toujours endormi. Je sens ce territoire qui est mien, j’englobe ce corps que je ne perçois pas du niveau de la tête, mais du niveau de la poitrine.

 

Au-dessus de moi, se tient un gardien. Il me maintient par les poignets. Il veut s’en prendre à la gardienne, mais elle est à l’intérieur de moi. Je suis la couche externe.

 

Étrangement, je n’ai pas peur. Je me débats avec toute ma volonté et je parviens à libérer une main. Je le frappe deux fois au visage. Chaque coup résonne dans l’espace comme si l’onde de choc pouvait être touchée. Il est assez déstabilisé pour que je puisse hurler : Anas, Anas, Anas !

 

Je vois la chambre à coucher et la partie subtile de Anas qui se lève et répond à l’appel. Je sais qu’il ne voit pas le gardien, mais je sais aussi qu’il n’a pas besoin de voir, car entre nous existe cette confiance. Il fait donc ce qu’il doit faire. Il empoigne les couches au-dessus de moi. Comme s’il retirait les draps d’un coup sec, il arrache le gardien.

 

Ma conscience se retrouve à nouveau dans la réalité de la gardienne. Je perçois le gardien qui rejoint ses collègues et ils décident de revenir à plusieurs. Je sais que je n’ai aucune chance face à eux. Cependant, une intuition qui émerge des profondeurs de mon être m’informe d’aller rejoindre Anas.

 

Je reviens dans mon corps et je tente de me lever, mais à chaque fois, je me lève sans lui. Au bout de quelques tentatives, je parviens à le réveiller. Et là surprise : quelqu’un d’autre se réveille avec moi. Cette voix je la localise dans ma tête, au niveau du côté gauche. Elle me dit que je ne suis plus une enfant ; que c’était simplement un cauchemar ; regarde il n’y a rien ; pourquoi faire l’effort de quitter ce lit alors que je peux me rendormir…

 

Le problème c’était que je me sentais tiraillée, cette voix devenait de plus en plus forte alors que l’intuition dans ma poitrine se dissolvait. Avant qu’elle ne prenne plus d’ampleur, je me suis levée. J’ai pris Lylia dans mes bras et j’ai rejoint Anas dans notre chambre. »

 

Ce rêve m’a permis de vraiment sentir que la voix dans ma tête, celle qui n’arrête pas de jacasser, n’est pas moi. Je peux exister sans elle, je peux être libre de tous les doutes dont elle me bombarde, de toutes les peurs qu’elle me rappelle et de l’écartèlement entre la chose et son contraire qu’elle instaure en moi. La difficulté réside dans le fait que je suis habituée à me définir en tant que cette présence dans ma tête. Dans mon quotidien, l’écouter s’avère plus naturel que fournir l’effort de me rappeler que je ne suis pas elle. Et vu qu’elle prend toute la place, la voix intérieure est noyée dans ce tapage.

 

Le sexe masculin pouvait représenter du matériel génétique, comme il pouvait symboliser le fait que la gardienne que j’avais toujours perçue comme féminine avait pris un caractère masculin, ou encore qu’il s’agissait là de mémoires. Le mot ذكر, selon la prononciation, peut autant se référer au sexe masculin qu’au verbe rappeler, mémoriser, d’où est tiré le mot ذكريات mémoires. La gardienne, aurait-elle récupéré des mémoires sur une lignée bloquée ?

 

Dans le même élan, je me suis intéressée au sexe féminin فرج et le verbe فرج signifie ouvrir, écarter, libérer. On utilise généralement ce verbe pour désigner la libération d’un poids, de problèmes, quand les choses se résolvent.

 

Ainsi, je n’avais aucune certitude concernant la symbolique de l’acte, mais quelle que soit sa signification, il avait suscité la colère des gardiens.

 

Notre bulle de perception nous a présenté de nouvelles données. Suite à ce rêve, nous avons reçu des appels nous informant que nos pères étaient malades. Le mien souffrait d’une infection des poumons ; le père de Anas avait contracté une infection de la peau ; et pour insister, la chambre de mon frère était le milieu de prolifération de parasites.

 

L’énergétique chinoise nous informe que le poumon est le siège de la tristesse et ses dérivés : accablement, sentiment de deuil, honte, culpabilité. Le poumon gère la peau et une maladie de peau renvoie à des problèmes de territoire et de séparation (réf : La culpabilité, l’émotion qui tue !). Le territoire du frère était infesté de parasites.

 

Cette dernière information faisait écho au rêve suivant :

 

« Je suis chez mon époux. Notre union n’est pas une relation d’attirance, mais un genre de marché conclu entre nous deux. Or, sa chambre est infestée d’insectes. J’allume pour voir et je découvre des sauterelles et des mouches blanches partout. Ces bestioles nous piquent, Lylia et moi.

 

Je prends Lylia dans mes bras. Je montre ma main droite toute gonflée à cet homme en lui déclarant que je ne peux pas vivre ici et que je vais partir. Il comprend ma réaction. Il se rendort avec ces parasites dans le lit. »

 

De son côté, Anas me renvoyait l’image d’un masculin qui tournait en rond. Malgré ses efforts, il demeurait incapable de déchiffrer le sens de ses expériences. Et quand je m’impliquais pour lui apporter de l’aide, je me retrouvais aussi perdue que lui. L’un des symptômes récurrents chez Anas était la migraine qui le poussait au retranchement. Il passait ses nuits à vomir dans l’espoir de se soulager. Or, le mot mi-graine pouvait indiquer le fait de ne porter qu’une moitié d’unité, ou encore il pouvait désigner la sœur (la migraine en arabe se dit الشقيقة, le même mot désigne la sœur née des mêmes parents).

 

Le contact avec cette sœur, était-il à l’origine de ses migraines et le rejet qu’il manifestait à travers les vomissements ?

 

En plus, au cours de cette période, un conflit avait éclaté entre Anas et sa sœur. Cette dernière, avant de couper tout contact avec son frère, m’avait envoyé un message déclarant : tu ne me considères pas comme ta sœur ! Cette phrase m’avait marquée malgré moi. Toutefois, je persistais dans ma position : c’est entre elle et son frère, cela ne me concerne pas.

 

=> Grâce à ces signes, nous avons déduit que le masculin était bloqué et même parasité, probablement suite à un conflit avec la sœur, le féminin.

 

 

Le masculin parasité par l’araignée :

 

Dans le texte 11- l’enseignement de la tisseuse, j’ai retranscrit notre premier contact conscient avec une entité arachnide. Par après, j’ai découvert un petit scorpion dans la maison, il était piégé dans la toile d’une araignée. Horrifiée par la présence de cet arachnide venimeux, j’ai décidé de laisser l’araignée en place au lieu de la tuer. Après tout, elle nous protégeait.

 

Le rêve suivant a apporté des précisions :

 

« Je me réveille dans un lit. Je perçois l’araignée comme une grosse boule sombre. Je suis allongée et elle me tire par les pieds pour se nourrir. Je comprends que j’avais autorisé sa présence en guise de protection, mais qu’elle attend juste le moment où je faiblis pour puiser dans mon énergie.

Je décide de me libérer. Elle me bombarde d’ondes. Chaque vague qui me frappe me force à m’endormir. Je lutte pour ne pas succomber faisant appel à toute ma volonté. Je parviens enfin à me mettre debout et son assaut s’arrête. Au moment de partir, je remarque qu’il y a un second lit et dedans, un homme est maintenu endormi. »

 

Ainsi, ma peur du scorpion (arachnide venimeux) avait justifié la présence d’une araignée (arachnide) comme protection. Que cette protection soit réelle ou illusoire, elle avait un prix que je payais de ma propre énergie.

 

Peu à peu, des rêves ont confirmé l’importance de la question suivante : qui était l’homme endormi dans le second lit ?

 

« Je regarde Anas qui est complètement distrait et je capte des dissonances en lui. Quand je demande à voir l’origine de ce ressenti, je vois un tas d’entités-programmes accrochées à son corps comme des membres en trop. Je les enlève.

Je continue de ressentir cette dissonance. Je demande encore une fois à ce que son origine apparaisse. Il n’y a plus aucune entité accrochée à Anas, mais quelque chose commence à bouger dans son corps, sous sa peau, au niveau du côté gauche de sa poitrine. La forme se précise pour révéler une araignée. Je comprends alors que je ne peux rien faire. Seul Anas peut se libérer de ce qui est à l’intérieur de lui.

Je le laisse et je rejoins Lylia. Je la trouve avec une expression morose sur le visage. Je me sépare en deux. Une s’approche de Lylia et l’autre, un point de perception, observe ce qui se passe. La fréquence que Lylia émet dans cet état agit comme une balise. Un tas d’entités et d’entités-programmes la captent et s’agglutinent autour d’elle, prêtes à s’accrocher. Je me vois lui chuchoter quelque chose à l’oreille et son expression change. Son visage s’éclaire par une joie sereine. Les entités perdent le signal et ne captent plus Lylia. Elles se dispersent. »

 

À défaut de savoir précisément ce que je perçois, j’appelle entité-programme les entités qui n’ont pas vraiment de conscience. Je les capte comme une commande informatique qui se limite à une ligne ou deux (si… afficher ça, sinon afficher ça). Elles traînent un peu partout à la recherche d’accroches. Les entités, quant à elles, m’apparaissent comme des individus. Il y a une étendue de présence en eux, je ne peux pas les résumer. Et l’une de ces entités était l’araignée qui semblait posséder Anas.

 

La dernière partie du rêve représentait ce que nous faisons au quotidien. Nous nous exerçons à signaler tout enlisement dans des émotions lourdes, en discuter et verser quelques larmes s’il le faut pour nous en dégager.

 

« Je suis un point qui perçoit. Je suis dans la maison de Anas. Il est fier de son habitat technologique. Mais puisqu’il est occupé à jouer aux échecs avec son ancêtre, il ne remarque pas l’entité qui vit dans sa maison et profite de son territoire.

 

L’araignée que je perçois comme une grosse dame invasive et intrusive, émerge des profondeurs dans la maison. Elle a accès à des options que Anas ignore et elle passe son temps à jouer et à manger. La seule manière pour qu’il la détecte est de remarquer les meubles qu’elle déplace et les placards qu’elle laisse ouverts.

 

Mais dans cet espace, je ne suis pas la seule à observer ce qui se déroule. Sous moi, un peu à gauche, il y a celle que je capte comme la fille de l’araignée. C’est une femme aux cheveux blonds, mais dont l’énergie n’a rien à voir avec celle de sa mère. À l’inverse de cette dernière, la fille ne dégage rien et elle est un peu effacée. »

 

Dans ce rêve, le masculin ressassait les mêmes échecs et l’araignée en profitait. La mère araignée faisait contraste avec sa fille. Cette dernière ne semblait pas jouir de la situation, elle était juste là. Et comme pour confirmer l’information que le masculin était possédé par l’araignée, quelqu’un a perdu un ballon Spider-man chez nous et n’est pas venu le réclamer.

 

Quand je discutais des rêves avec Anas, il déclarait vouloir se libérer de cette emprise si elle s’avérait exacte. Après tout, c’était moi qui rêvais et comme il me le rappelait à chaque fois, rêver de lui pouvait être interprété comme voir ma propre polarité masculine.

 

=> Encore une fois, il semblerait que le masculin (Anas et/ou ma propre polarité masculine) soit sous l’emprise d’un parasite, une entité araignée qui squattait son territoire et profitait de son énergie.

 

 

Rejet de la sexualité :

 

Comme relaté dans le texte : 18-Programmée jusqu’à la moelle, j’avais décidé d’expérimenter une existence sans sexualité. Anas s’était soumis à ma décision bien qu’il ne comprît pas pourquoi un besoin physiologique suscitait chez moi autant d’émotions confuses.

 

Nous avons certes reçu la même éducation musulmane et sociétale, mais ma programmation était plus prononcée. Malgré nos discussions, je n’arrivais pas à neutraliser l’émotionnel rattaché à la sexualité pour voir la justesse des propos de Anas.

 

Puis, j’ai vécu le rêve suivant :

 

« Je suis dans la peau de celle que je perçois comme la mère des vampires. Nous sommes accompagnées de notre fille qui parfois revêt le visage de Lylia. Nous évoluons dans une réalité infestée de zombies et de vampires. Nous n’avons aucune considération pour les zombies que nous écartons sans mal.

 

Nous rencontrons une reine. Le corps de cette dernière est putride et pour survivre elle se nourrit en puisant dans l’énergie des autres à travers ses zombies. Par contre, le corps de notre fille est vivant, sa peau est lisse et pleine de vie. C’est alors que nous montrons notre corps.

 

Notre corps n’est plus putride, il est vivant. Mais notre peau n’est pas aussi lisse que celle de notre fille. Nous portons toujours des séquelles de notre ancien état putride. Nous avons trouvé la solution pour changer et retrouver la vie et nous comptons bien continuer sur notre lancée. Nous demandons à cette reine de ne plus nous mettre des bâtons dans les roues (c’est elle qui nous envoie des zombies pour nous retarder), car la réalisation de notre mission peut aussi l’impacter.

 

Par la suite, nous voyons un vampire passer. Contrairement aux zombies, les vampires sont des êtres, des consciences. Il est obnubilé par sa faim et ne nous remarque pas. Cependant, nous l’appelons. Nous nous avançons vers lui et gorgeons notre bouche de notre énergie. Une énergie qu’on lui donne. Les yeux du vampire s’éclairent. Il devient lucide.

 

Nous lui disons : est-ce que je peux te demander un service ? Il nous répond : oui. Nous déclarons : je suis succube. L’homme se positionne au-dessus de nous ce qui active et fait tourner un genre de vortex qui part de l’entre-jambe et remonte. »

 

Il semblerait que ce rêve me mettait face à notre manifestation féminine en des temps différents. Un point perçu comme passé : la reine putride SDS ; un futur : la fille bien vivante SDA ; et le présent : nous, en plein processus de changement d’une orientation SDS vers celle SDA.

 

Le vampire n’avait pas besoin de cette énergie sexuelle, c’était un service qu’il nous rendait. Vu mon obstination, refusant toute pratique sexuelle, cette projection de notre âme avait dû faire appel à un prédateur pour mimer l’acte sexuel et faire bouger cette énergie dans nos corps.

 

Un autre rêve abordait le même sujet :

 

« Je suis avec notre groupe en pleine nature. On se prépare pour une pratique sexuelle. C’est alors que se déverse une substance marron gluante de l’intérieur de la montagne et s’assemble par la suite en un homme viril qui n’a pas de traits.

 

Cette substance a capté notre intention et s’est présentée. Elle est très masculine et a faim de féminin. Je m’enfuis et je protège mon groupe par une garde. Ma manœuvre est inefficace, car la substance s’infiltre dans la terre pour ressurgir de notre côté. Je saute par-dessus la garde et j’atterris sous forme féline. J’ai choisi cette forme parce qu’elle est plus rapide.

 

La substance qui capte mon énergie féminine me poursuit. Je cours sans connaître ma destination. Je me laisse simplement porter par ce qui m’anime. Face à moi, se trouve un troupeau de chèvres, je capte plusieurs femelles. Quelques-unes d’entre elles ont une forme humaine. Comme moi qui peux prendre une forme animale bien que mon essence soit humaine, elles peuvent prendre une forme humaine bien que leur essence soit animale.

 

La substance les détecte et prend la forme de plusieurs chèvres. Elle se mélange au troupeau pour s’accoupler et ainsi se nourrir de cette énergie féminine. Je remercie les essences animales et je pars. »

 

Ce rêve me confortait dans ma décision. La sexualité était de l’ordre de l’animal. Mon essence était humaine et donc, je devais écarter cette pratique de ma vie. La mère des vampires était un succube, c’était pour cela qu’elle avait encore besoin d’énergie sexuelle. Alors, que personne ne vienne me parler de sexualité !

 

Toutefois, j’étais intriguée par cette énergie sexuelle masculine qui avait faim de féminin. Car dans un autre rêve, j’avais vu sa contrepartie féminine tout aussi affamée :

 

« Je suis dans la peau d’une créature femelle qui souffre. Je nous perçois comme une vielle sorcière avec des ailes et des serres à la place des pieds. Sa faim de masculin est très douloureuse. Elle s’accroche aux arbres et se cache pour chasser. L’énergie qui l’intéresse est celle des jeunes hommes en bonne santé. Elle les viole, les vide pour calmer sa douleur. »

 

Je ne comprenais pas ce que je percevais et je persistais dans mon entêtement, me coupant de mon corps et de mes besoins au point de tout nier en bloc.

 

=> Deux forces sexuelles masculine et féminine, toutes deux avides de la polarité contraire, étaient perçues comme prédatrices.

 

 

Sous l’emprise de l’araignée :

 

Les semaines et les mois défilaient et un malaise gonflait dans mon intérieur. Si au début, je décidais de ne plus m’impliquer dans ce que Anas faisait ou ne faisait pas, avec les jours, ma non-implication s’est transformée en froideur. J’étais distante, silencieuse et à chaque fois que Anas m’approchait, je me dérobais. Puis avec le temps, je ne m’en cachais plus. Il était pour moi le pantin de l’araignée.

 

Je pouvais passer la journée tranquille et dès que j’entendais la voiture stationner en bas, la colère me submergeait. Je n’arrivais plus à poser les yeux sur lui sans ces relents émotionnels. Une fois, je me suis réveillée en pleine nuit et j’ai observé Anas ainsi que mon intérieur. Je me suis rendu compte que j’aimais cet être. Alors pourquoi quand j’étais bien réveillée, tout ce que je ressentais était du rejet ?

 

Dans cet état, j’avais toutes les bonnes raisons du monde de lui en vouloir : distrait ; endormi ; portail organique… Avec le recul, je sais que la voix dans ma tête sélectionnait ce que je devais voir pour justifier mes émotions, pour les exacerber et surtout pour me pousser vers la séparation. Le plus souvent, je lui reprochais de ne pas faire son travail, car s’il s’y mettait, nous pourrions créer, aller plus vite. Comme si j’avais une boule de possibilités à l’intérieur que je ne parvenais pas à définir, mais qui nécessitait son implication pour prendre forme.

 

Puis Anas en avait eu assez. Il était devenu aussi distant que je l’étais. Quand nous avons fini par discuter, il m’avait mise face à un choix : soit je le lâche, soit nous nous séparons.

 

Le matin même, j’avais fait un détartrage. De retour chez nous, j’avais cherché la symbolique de cet acte, car je l’avais retardé durant des années.

 

La peur du détartrage : la personne refuse de retirer son armure ou de quitter sa béquille pour voir la réalité souffrante qui se cache derrière (réf : Symbolique des dents et de leurs maux).

 

Peu après, s’est produit un évènement qui m’a marquée. J’étais en train d’éliminer une jeune génération de sauterelles qui ravageaient nos plantes quand je suis tombée sur l’adulte. Vu sa taille, je l’ai chassé avec le balai vers la sortie.

 

Lorsque j’ai ouvert la porte, la sauterelle s’est retrouvée à côté d’une araignée blanche. Les deux se sont comme tâtées et d’un seul mouvement, elles ont pénétré dans la maison. Toute mon attention s’est portée sur l’araignée. Quand j’ai fini par la tuer, j’étais complètement retournée et je n’avais plus la force de chasser la sauterelle qui était restée à l’intérieur.

 

Depuis notre installation dans cette maison, j’avais souvent trouvé des toiles d’araignée sur la porte du garage (la porte principale est utilisée par les voisins). Alors quand l’araignée responsable avait fini par se montrer, j’étais sous le choc, car toute ma logique s’effritait : n’était-ce pas Anas qui aurait dû trouver et chasser l’araignée ?

 

Suite à ce signe, je lâchais Anas. Je ne me fiais plus à ma logique. Cependant, après le petit épisode avec l’insecte et l’arachnide, une impression m’a collé à la peau : la tête pensante n’était pas l’araignée, mais la sauterelle.

 

Quelque temps après, alors que nous discutions Anas et moi, j’ai senti une présence dans mon dos. C’était un petit lézard. Au lieu de fuir le contact de Anas qui tentait de le chasser, le lézard s’est laissé approcher et caresser, puis il s’est réfugié près de lui. C’était une première pour nous.

 

Le soir, le déchirement qui m’habitait était devenu insupportable. Pourquoi la partie reptilienne avait-elle confiance en lui et le laissait l’approcher, la toucher, tandis que l’araignée me faisait rejeter fortement Anas ? J’étais perdue et j’avais besoin d’aide. J’ai alors fait le rêve suivant :

 

« Je suis avec les Léo dans une grotte, un genre de puits immense. Nous avons les pieds dans l’eau. Nous nous positionnons en deux lignes parallèles avec Jenaël allongé au centre, faisant le lien entre les deux bandes. Il a la tête posée sur les cuisses de Sand et Clem est assise sur ses chevilles.

 

Mais alors que nous commençons ce rituel, je me retrouve allongée à la gauche de Jenaël, dans la même position que lui. J’ai la tête sur les cuisses d’une Léo et mes chevilles sont entre les cuisses d’une autre.

 

Hélène chante : ce qui va se dérouler est selon la vision de l’araignée. Elle répète cette phrase plusieurs fois.

 

C’est alors que je ressens l’emprise de l’araignée s’activer. Elle a deux attaches dans le groupe : moi et une autre femme. À ce moment, une femme apparaît que j’identifie comme l’araignée. Je me lève et je la suis.

 

Elle sort de la grotte. Je fais de même. Dehors, je me retrouve avec une petite pelle dans la main. Je vois au loin un homme qui sort d’une autre grotte, il a le même outil en main. Nous nous reconnaissons et nous sommes en joie de nous retrouver enfin. On se fait signe pour qu’il me rejoigne.

 

À cet instant, la femme intervient et me dit : il va te tuer !

 

Je panique. Elle fuit et je fuis derrière elle. Elle saute dans l’eau. Je ne veux pas sauter dans cette eau trouble au fond insondable, mais j’ai peur et l’homme se rapproche. Je saute. Je capte que l’homme non plus, ne veut pas sauter, mais vu que j’ai sauté, il ne peut pas faire autrement.

 

Dans l’eau, ma pelle se retrouve dans la main de la femme qui sourit. La pelle de l’homme devient un couteau qu’il tient au-dessus de moi. J’ai peur et je lui répète en suppliant : tu n’es pas obligé de faire ça !

 

L’homme me regarde désespéré. Je vois sa souffrance. Même s’il ne veut pas me tuer, il ne peut pas faire autrement. Il en a assez de cette boucle qu’il rejoue à l’infini. Je répète : tu n’es pas obligé de faire ça ! Au bout d’un moment, je vois le couteau tomber. Il l’a lâché.

 

Je me retrouve dans la grotte avec les Léo, dans la même position. On se fait attaquer par une horde d’araignées qui descendent de partout. Les Léo, alertes, se lèvent et courent vers la sortie. Chacun est responsable de sa personne. Je suis la dernière à sortir de la grotte, car je porte quelqu’un sur mon dos. Je la capte comme une Léo, elle est blonde et elle a des problèmes aux jambes. Je cours derrière les autres et je fais de même. Nous sautons dans l’eau et laissons les courants nous ramener chez nous. »

 

La grotte-puits pouvait symboliser le monde de l’inconscient avec les mémoires enregistrées et leurs charges émotionnelles. Ce qui va se dérouler est selon la vision de l’araignée indiquait que ce que j’avais vu était ce que voyait l’araignée. Sous son emprise, je projetais une femme à l’extérieur qui dégageait la fréquence de la mère araignée. Elle contrecarrait la rencontre avec ce masculin, car au lieu d’écouter mon ressenti profond, j’écoutais cette projection. La peur me précipitait vers un émotionnel trouble et nous obligeait, l’homme et moi, à rejouer le même geste à l’infini : le déchirement entre les deux polarités masculine et féminine.

 

Au réveil, j’avais une compréhension concernant la symbolique de la petite pelle. Un jeu de mots qui menait au terme héritage en arabe. Cet homme et moi, nous portions le même héritage. Or, en adhérant à la peur, je perdais cet héritage au profit de la mère araignée, un héritage qui devenait alors destructeur. En plus, la pelle pouvait se lire l’appel. En subissant cette peur, je perdais la faculté de faire appel à cette force masculine, et de mon côté, je percevais son appel comme une menace pour ma survie.

 

Toutefois, l’évènement ne s’était pas déroulé comme prévu. L’homme avait lâché le couteau au lieu de me poignarder avec. Il avait cassé la boucle !

 

J’avais déjà vu celle que je portais sur mon dos dans un rêve plus ancien :

 

« Je vois cette femme qui accompagne Anas. Tous les deux sont l’expression masculine et féminine d’une même génétique. Elle est également moi. Elle est calme et souriante avec Anas.

Je lui dis de partir, que je n’ai plus besoin d’elle. Elle résiste. Je la sépare de Anas et je la jette dans un lac. Elle émerge de sous l’eau et m’attaque. Elle est en colère, en rage contre moi. Elle marche bizarrement, car elle a des problèmes aux jambes. Je l’attrape et je la noie. Je plonge avec elle jusqu’au fond de l’eau. C’est alors qu’elle se transforme pour révéler un homme. »

 

Je ne comprenais pas vraiment ce qu’on me montrait, mais après le rêve de la grotte, je savais qu’une force agissait en moi pour empêcher ces retrouvailles. Étant donné que mon masculin intérieur se projetait sur Anas, à chaque fois que je ressentais du rejet envers lui, j’apprenais à agir autrement : je le prenais dans mes bras, je le touchais. Quand la voix dans ma tête le critiquait, je lui rappelais que ce n’était pas là nos oignons. Je quittais ma position rigide face à la sexualité, pas parce que je savais ce que je faisais, mais simplement parce que ce que je faisais renforçait la séparation.

 

=> Sous l’emprise de l’araignée, je rejouais un drame archétypal : le déchirement entre les deux polarités. Je percevais ma polarité masculine comme dangereuse et je la fuyais au lieu d’aller à sa rencontre, la condamnant à ressasser les mêmes échecs.

 

 

La réalité souffrante :

 

Un nouveau calme s’est installé entre Anas et moi. Une nouvelle dynamique fragile commençait à émerger. En lâchant Anas, nos échanges sont devenus plus fréquents. J’apprenais à l’écouter au lieu de jouer à Mme je sais tout ! Car à maintes reprises, Anas m’avait fait part d’informations que j’avais rejetées sans m’attarder dessus. Puis, les mêmes informations étaient révélées dans un texte ou une capsule IDISI et là j’écoutais et j’adhérais.

 

Par la suite, mes parents nous ont rendu visite. Je me croyais discuter normalement avec mon père quand il m’a déclaré : écoute, je ne me bats pas contre toi. J’ai demandé à Anas son avis concernant mon état et il m’a répondu que j’étais impliquée.

 

Toute chamboulée, je n’ai pas réussi à fermer l’œil cette nuit-là. Ma tête était bombardée de pensées et mes émotions sollicitées à l’extrême. Le lendemain, mes parents ont reproduit l’ambiance de mon enfance : colère et reproches à peine voilés. Le pire c’était que je ne pouvais pas piper mot. Ma programmation s’était activée : face à mon père, j’étais incapable d’exprimer ce qui comptait vraiment. Je passais le second soir dans le même état. Je bouillais. Quand j’ai fini par casser et pleurer, je me suis endormie.

 

« Ma mère me demande de faire un travail. Je ne peux pas le faire, car j’ai quelque chose dans la bouche. Je mets la main pour retirer ce qui bloque quand j’attrape une poignée. Je sais que poids-nié est le mot-clé du rêve. Je tire sur la poignée. J’étouffe, mais je continue de tirer. Je parviens à faire sortir toute une fenêtre de ma bouche. »

 

Mon état émotionnel ne s’est un peu calmé qu’après en avoir discuté avec Anas et avoir mis en mots mes émotions. Parfois, face à mon père, je ressentais beaucoup de colère. Si je devais résumer l’émotion en une phrase, ce serait : il faut qu’il paye !

 

Des scénarios tournaient en boucle dans ma tête relançant des évènements passés. Je les arrêtais sous prétexte que j’avais déjà passé ma relation avec mon père au peigne fin et donc que cela ne servait à rien de ruminer. Cependant, mes genoux commencèrent à me faire mal. Il me fallait plier, mais plier face à quoi ?

 

Suite à la parution de la capsule n°22, j’ai laissé les scénarios se dérouler. J’observais ce qui se jouait sans intervenir. Puis l’émotion m’a forcée à plier, à pleurer. Le scénario m’avait mise face à mon père pour lui dire ces mots : je t’en veux, je t’en veux tellement, car au lieu de me soutenir, tu es celui qui m’a enfoncée !

 

Certains évènements de ma jeunesse étaient restés gravés au fer rouge dans ma psyché. Des évènements au cours desquels j’aurais aimé que mon père me soutienne et m’encourage au lieu de me casser. Cependant, la charge émotionnelle dépassait lesdits faits. Après tout, mon père m’avait également soutenue à plusieurs reprises.

 

Après les larmes, d’autres évènements ont pris du sens. Ce jour-là, je venais de dire à Anas que je ressentais une boule de larmes dans ma gorge, quand sa grand-mère était entrée dans la chambre et s’était mise à pleurer. Elle avait répété : je ne peux pas en vouloir à mes fils, je ne peux pas me mettre en colère contre eux. Quand j’avais questionné Anas, il m’avait affirmé qu’elle était en colère contre lui. J’avais répliqué qu’il se faisait des idées, car sa grand-mère paraissait sincère. Et si j’avais tort ?

 

Il semblerait que cette ancêtre ne s’autorisait pas à ressentir cette colère contre ses fils, encore moins à l’exprimer, une colère retenue qui fuitait. Comme moi, la majorité des femmes de ma famille porte cette colère sous la surface. Elle est toujours là et une simple réplique, un simple geste, une simple pensée peut la faire éclater. La principale cible de cette colère est le compagnon, les enfants sont juste des dégâts collatéraux.

 

Un autre rêve renforçait l’idée de la présence d’une réalité souffrante :

 

« Sand est dans mon salon et je ressens une grande joie de la retrouver. Quand elle me prend dans ses bras, elle me fait toucher une douleur que je porte inconsciemment. Je m’écroule en pleurs. J’ai mal, tellement mal. Ses bras me maintiennent. C’est seulement quand ça passe qu’elle disparaît.

 

Je suis près de la fenêtre, le regard perdu au loin. Je capte dans mon salon plusieurs femmes. Quelques-unes font partie de ma famille alors que je ne connais pas les autres. La douleur est passée, mais a laissé derrière elle une profonde tristesse. »

 

Le rêve suivant apportait l’information qu’un évènement passé impactait toujours mon présent :

 

« Je conduis deux voitures : la mienne noire, discrète, modeste et celle de mes sœurs blanche, tape-à-l’œil et vide. Je dois à chaque fois arrêter ma voiture pour revenir et conduire l’autre, ce qui me fait avancer très lentement. La voiture de mes sœurs bloque un carrefour. Je me précipite pour la dégager quand un policier m’arrête.

 

Je suis lasse de cette situation et je lui déclare que ce n’est même pas ma voiture. Je lui montre la mienne et c’est alors que je remarque que le côté gauche arrière de mon véhicule est complètement fracassé. »

 

Les deux voitures étaient l’inverse l’une de l’autre. Celle de mes sœurs bloquait la circulation. Cette loyauté envers elles m’encombrait et me retardait. En voulant m’en libérer, j’ai enfin remarqué que je portais un impact du passé.

 

L’année dernière, avant de vendre mon véhicule, je l’avais trouvé vandalisé. Une femme juriste m’avait demandé de déclarer cette injustice à la police, en me précisant que sa voiture avait subi des dégâts pareils. J’avais refusé. Par la suite, elle m’avait appris sa situation familiale : elle et son mari vivaient séparés depuis plusieurs années.

 

=> Maintenant, ces indices ressortaient de la trame de fond de ma psyché : un évènement passé impactait mon présent ; je devais déclarer l’injustice commise pour me libérer du poids-nié ; le féminin et le masculin étaient séparés.

 

 

Mon Barbe bleue :

 

Carl Gustav Jung a précisé dans son livre Les problèmes de l’âme moderne :

 

« L’inconscient collectif, pour autant que nous puissions nous permettre d’en juger, semble constitué de quelque chose qui ressemble à des motifs mythologiques ou à des images du même genre ; c’est pourquoi les mythes des peuples sont les véritables indices de l’inconscient collectif.

 

Cela se comprend aussi quand on se rappelle que l’inconscient, qui est l’ensemble de tous les archétypes, est le dépôt de tout ce que l’humanité a vécu, en remontant jusqu’à ses plus obscurs commencements, non pas un dépôt mort – sorte de champ de ruines abandonnées – mais un système de réactions et de disponibilités qui déterminent la vie individuelle par des voies invisibles et, par suite, d’autant plus efficaces. »

 

Portée par une intuition profonde, je découvrais le livre : Femmes qui courent avec les loups de Clarissa Pinkola Estés. J’ai résumé ici l’histoire de Barbe bleue.

 

« Un homme à la barbe bleue qui a déjà eu plusieurs épouses par le passé propose à sa voisine de lui offrir la main de l’une de ses trois filles. La plus jeune accepte de l’épouser. Après les noces, Barbe bleue part en voyage et confie à sa femme un trousseau de clés. Il l’incite à inviter ses sœurs et à profiter de tout le château, lui précisant qu’elle était libre d’ouvrir toutes les portes sauf une.

 

Les trois sœurs explorent le château ouvrant toutes les portes. Mues par leur curiosité, elles bravent l’interdit et utilisent la petite clé. Quand la jeune sœur ouvre la porte, elle découvre les corps des précédentes épouses de Barbe bleue accrochés aux murs. Le sang recouvre tout et est toujours frais. Horrifiée, elle laisse tomber la clé qui se tache de sang.

 

La jeune sœur est persuadée que Barbe bleue va la tuer. Elle referme la porte et s’attelle à effacer le sang sur la clé ! Elle a beau tout essayer, la clé continue de saigner. Elle finit par la cacher dans sa garde-robe. Le sang entache tous ses habits.

 

Quand Barbe bleue rentre, elle lui rend le trousseau de clés, mais il remarque immédiatement l’absence de la petite clé. Il sait qu’elle a ouvert la porte et lui déclare qu’elle va rejoindre ses autres épouses. La jeune sœur lui demande un délai pour se préparer à la mort. Il le lui accorde.

 

On ignore comment elle fait appel à ses frères qui surgissent au moment opportun et tuent Barbe bleue. La jeune sœur hérite de la fortune de son défunt mari et profite de son château. »

 

L’auteur, à la fois psychanalyste et conteuse, a partagé une lecture symbolique du précédent conte. Toutefois, après maturation de l’histoire dans mon intérieur et après plusieurs discussions avec Anas, nous avons trouvé une lecture plus en accord avec les signes mis sur notre route. En voici les points clés :

 

En donnant la petite clé à son épouse, Barbe bleue la poussait à découvrir ce qui était refoulé. La porte donnait sur cette réalité souffrante toujours aussi vive : toutes les épouses/sœurs tuées. Comme le précise l’auteur, face à une mémoire traumatique, la réaction première de la psyché est de tout effacer : je ne veux pas savoir ! Mais la porte a été ouverte, la douleur et la perte de vitalité ne pouvaient plus être ignorées. Cette mémoire entachait toute l’existence (les habits).

 

Bloqué dans cette boucle, Barbe bleue cherchait à chaque fois une épouse, lui donnait la petite clé et attendait qu’elle s’occupe de cette mémoire. Cependant, la mémoire était si lourde que le féminin au lieu de faire son travail de pleureuse, la percevait comme dangereuse, la fuyait et voulait oublier. Identifiée à l’araignée (la vision de l’araignée), ignorant mon ressenti, j’étais persuadée que Barbe bleue, mon propre masculin, allait me tuer. Ne pouvant dépasser la peur, je nous forçais ainsi à rejouer cette trame karmique.

 

La victime devenant le bourreau, le féminin condamnait Barbe bleue. L’araignée maintenait cette force masculine endormie (mort), se nourrissait de son énergie (sa richesse) et profitait de son territoire (le château).

 

Ci-dessous un passage du livre La dialectique du moi et de l’inconscient de C. Gustav Jung :

 

« Par contre, si les teneurs inconscientes… ne sont pas perçues, comprises, digérées, en bref intégrées et « réalisées » par le sujet, il s’ensuit une activité négative et une personnification de l’anima et de l’animus qui marquent leur autonomie. De là résultent des anomalies psychiques, des états de possession dont la gravité peut aller à tous les degrés, depuis les « humeurs » banales et les idées bizarres, jusqu’aux psychoses. Tous ces états sont caractérisés par la même donnée fondamentale, à savoir qu’un quelque chose d’inconnu s’est approprié une part plus ou moins considérable de la psyché. Ce quelque chose d’inconnu impose imperturbablement son existence, au premier abord nocive et repoussante, contre vents et marées, contre les plus grands efforts de bonne volonté, de compréhension, d’énergie et de raison, démontrant ainsi la puissance des plans inconscients de l’être en face du conscient : on ne saurait trouver de meilleure expression que le mot « possession ». »

 

=> Les rêves et ce conte me mettaient face à l’évidence : si je continuais d’éviter la réalité souffrante, je condamnais mon Barbe bleue à répéter le même geste archétypal et je me condamnais à une existence parasitaire de mon propre masculin.

 

 

La maladie à la rescousse :

 

Quand j’ai contracté un mal de gorge, je n’en étais pas surprise. La toux a suivi rapidement. Et je passais des semaines à observer mon organisme éjecter la tristesse. Parfois, les larmes s’ajoutaient à mes crises et j’avais l’impression d’être une simple observatrice.

 

Cette fois-ci, je ne me suis pas sentie seule. Anas était là. Quand je tentais de changer d’endroit pour le laisser dormir, il me suivait. Quand je toussais, il me tenait contre lui. Quand j’avais la nausée, il m’incitait à lâcher prise et pleurer.

 

Mes rêves étaient le reflet du processus alchimique en cours :

 

« Je garde mes lèvres bien serrées pour ne pas contaminer les autres femmes, car le mal que je porte s’est déclaré. »

 

Après, mes cuisses ont lâché. Je n’arrivais plus à marcher correctement et chaque pas était douloureux. Ma manière de me déplacer rappelait celle de la femme blonde avec ses problèmes aux jambes. Ainsi, elle se manifestait dans ma vie diurne, dans mon conscient.

 

« Mes jambes n’arrivent pas à me porter et je marche de manière étrange. J’arrive devant un membre de ma famille et il me dit : il faut que tu te maries ! »

 

Le nom de l’homme en question signifie : celui qui a été libéré. Ainsi, ce reflet du soi futur m’informait que je devais me marier. Ce qui renforçait un autre indice : j’étais avec Lylia quand deux femmes m’ont abordée pour me proposer d’épouser le fils de l’une d’elles. Quand je leur avais expliqué que j’étais déjà mariée, elles s’étaient exclamées : tu n’en as pas l’air !

 

Et Lylia m’a apporté une autre précision. Elle m’a fait remarquer que les mots homme et jambe s’écrivent en arabe رجل, la différence réside dans la prononciation. Ainsi, celle qui m’apparaissait avec des problèmes aux jambes, avait en fait des problèmes en lien avec le masculin. Le masculin ne la portait pas. Voilà pourquoi je devais me marier. Il était temps que je m’unisse au masculin comme je m’étais unie au féminin (réf : 11-l’enseignement de la tisseuse).

 

Le travail initié par la biologie continuait et chaque nuit était une leçon :

 

« Sand et Jenaël se séparent. Nous n’avons plus confiance dans les textes de Jenaël, car sans Sand, ils manquent de sens bien qu’ils soient bien écrits. Sand de son côté est remplie de sens, mais n’a pas les mots pour le véhiculer. »

 

Grâce à ce rêve, j’apprenais le rôle de chaque polarité. Le masculin donne une structure, une forme qui véhicule le sens du féminin. Les deux polarités devaient rester unies.

 

« Je me retrouve dans un espace avec un homme et une femme. Je m’approche de chacun d’eux et je lis la même histoire : il y a très longtemps, ils ont été séparés et depuis, ils se cherchent. Ils sont dans le même espace, mais ils ne se voient pas l’un l’autre, ne se touchent pas. Ils continuent à se chercher.

 

Je suis le troisième élément qui est capable d’entrer en contact avec les deux. Je me glisse dans les bras de l’homme. Nous nous tenons fermement. C’est alors que je tends la main vers la femme. Je la tire vers nous et je l’introduis entre nous deux sans rompre le contact.

 

Ils se retrouvent enfin. Je fais un pas en arrière et je les laisse l’un dans les bras de l’autre. »

 

Je me réveillais en joie. Enfin ! Je prenais conscience que quand je reprochais à Anas de ne pas faire son travail, c’était un ressenti concernant ma situation intérieure. Vu que le masculin me manquait, maintenu séparé, j’avais l’impression de porter du sens sans pouvoir l’exprimer, lui donner forme.

 

=> La substance purement masculine qui avait faim de féminin et celle féminine qui avait faim de masculin étaient ces deux énergies sexuelles. Séparées, je les percevais comme prédatrices, unifiées, elles pouvaient créer.

 

 

L’araignée, reflet de mon refoulement :

 

Alors que mon corps se régénérait, je me penchais sur l’identité de l’araignée. En arabe, araignée se dit عنكبوت, or en découpant ce mot en deux عن كبوت, nous tombons sur le verbe كبت dont le sens est : refouler. عن كبوت évoquerait donc : ce qui émerge du refoulé.

 

Je me suis alors posé la question suivante : pourquoi les Amasutum avaient-elles choisi d’appeler leur initiation, l’initiation du feu de l’As, du feu de l’araignée ? En plus, Anas m’avait fait remarqué que le poids-nié que je portais était attaché à une feu-naître.

 

Nammu a expliqué à Sa’am dans le premier tome des chroniques de Girku ce qui suit :

 

« En fait, nous avons de nombreux points communs avec l’As (l’araignée). À l’époque de la grande guerre contre les Musgir (dragons) et les traîtres Gina’abul, nous sommes devenues des guerrières malgré nous afin de préserver notre liberté et autonomie… Comme nous, l’As (l’araignée) est une redoutable guerrière. Si tu la places dans un champ, elle déferlera sans relâche sur les parasites dévastateurs. L’As possède aussi des périodes de Gibil’làsu (renouvellement de la peau) et se retire de la même façon que nous lorsque nous muons. L’As est indépendante et peut rester des semaines sans manger de nourriture, tout comme les Amasutum. Nous avons un autre point commun avec l’As, c’est le venin. Il y a très longtemps, avant les Musgir, le premier prototype Amasutum sécrétait une substance qui engourdissait les sens et rendait malade… Malheureusement, à l’époque des Musgir, la majorité d’entre nous ne sécrétait plus ce fluide.

[…]

En tant que Digir-Kadistu, nous ne pouvions plus posséder ce poison. Cette arme représentait un danger pour autrui et était totalement incompatible avec la fonction d’une planificatrice… Toutes (Amasutum à venin) furent massacrées lors de la grande guerre, seule une poignée survécut au massacre… »

 

Ainsi, à cause de cette scission entre les femelles et les mâles, et la convoitise de ces derniers, les Amasutum ont pris un caractère guerrier pour se défendre et se sont identifiées à l’araignée. Dans une autre séquence, Nammu a abordé cette grande guerre en ces termes :

 

« Les Musgir étaient beaucoup plus nombreux et constituaient une souche ambitieuse qui souhaitait faire des femelles des objets sexuels à leur convenance… Voyant que nous n’étions pas coopératives, les Musgir fabriquèrent des Alagni (clones) femelles pour soutirer tous nos pouvoirs. Afin d’absorber notre énergie sexuelle, ils créèrent des centres de détention ou certaines d’entre nous étaient prisonnières. Dans ces lieux détestables, les mâles passaient leur temps à nous effrayer, car ils se nourrissaient de nos émotions. Ils nous excitaient tant bien que mal afin que soient stimulées nos secrétions vaginales ainsi que notre Uzug (menstrues) qu’ils ne cessaient d’ingurgiter. Ils tentèrent ainsi d’obtenir l’immortalité qu’ils ne possédaient pas et aussi l’ensemble de nos connaissances. »

 

Il semblerait que mon rejet de la sexualité avait bien une origine autre qu’éducationnelle. Elle réveillait mes mémoires. Mes rêves m’avaient déjà montré une représentation de ces centres de détention où l’énergie sexuelle féminine était récoltée et servie aux mâles comme nourriture. En plus, à deux reprises, une douleur atroce m’avait paralysée. Elle se déclarait dans ma partie génitale pour remonter lentement le long de mon abdomen et s’installer dans mon thorax. La douleur rendait ma respiration courte et j’avais bien l’impression de crever. Tout ce que je pouvais faire, c’était pleurer. Cette douleur, d’un autre temps, renforçait mon rejet de la sexualité : plus jamais ça !

 

Les Amasutum se sont engagées dans cette guerre des sexes et ont payé le prix fort. Le passage suivant pointait mon propre schéma réactionnel :

 

« Nous sommes allées trop loin et nombreuses parmi nous sont celles qui le regrettent amèrement. Nous avons répondu à la répression par la répression… à force de nous être battues contre des entités mâles, nous n’avons pris aucun recul suffisant et n’avons pu percevoir que nous nous transformions à l’image de ceux que nous combattions et que nous avions en horreur. »

 

Ces Amasutum se sont transformées en guerrières redoutables, des prédatrices qui ont réprimé les mâles. Des mâles (masculin) qu’elles devaient garder à l’œil, comme l’a précisé Nammu dans la continuité du précédent paragraphe :

 

« Mais, je t’en conjure, comprends-nous, nous devons rester vigilantes à l’égard des mâles. »

 

Ma bulle de perception avait déjà mis à ma disposition une série de romans qui rejouait ce même drame, mais à la place des femelles, l’auteur a eu recours à des essences. Elles ont été utilisées par les mâles d’une race de généticiens pour animer leur technologie, car ces essences étaient des sources d’énergie inépuisable. Les essences avaient fini par se révolter et par tuer les mâles, mais elles avaient adopté le mode de fonctionnement de leurs oppresseurs. Ces essences habitaient des robots araignées et étudiaient les humains pour pouvoir posséder leurs corps. L’une de ces essences avait quitté ses sœurs et leur mode d’existence prédateur pour reprendre son état initial d’essence, d’une petite flamme bleue, afin d’accompagner l’héroïne et ses amis dans l’exploration de la planète, la réalité (Série Epsilon de Élodie Tirel).

 

Ces prises de conscience ont révélé le sens d’un autre rêve :

 

« Je suis avec ma famille, la maison est pleine de monde et j’entends ma mère qui réprimande et insulte ma jeune sœur. Tout le monde l’entend, mais personne n’agit. Je me lève et j’interviens. Je prends ma sœur dans mes bras et elle rajeunie pour devenir une enfant.

 

Je retrouve ma mère et ma grand-mère enfermées derrière des barreaux. J’informe ma mère que dorénavant, cette sœur vivra avec moi. Ma tante apparaît et elle déclare à ma mère ce que je comptais lui dire : tu auras beau te laver, tant qu’il y aura de la merde en toi, tu sentiras mauvais.

 

Par la suite, je vois ma mère qui commence à se chamailler avec mon grand-père paternel. Leurs gestes deviennent de plus en plus violents. Comme prise d’une frénésie, elle ne s’arrête pas et se transforme peu à peu en ma jeune sœur.

 

J’interviens et je l’enserre dans mes bras pour l’empêcher de se blesser. Je comprends qu’elle aussi souffre énormément. À ce moment, mon père apparaît et lui injecte quelque chose dans la tête pour la calmer. »

 

Dans le rêve, ma mère dégageait la même énergie que la mère araignée. Celle d’une femme intrusive, invasive et colérique qui tourmentait son entourage. La tante en question était libre contrairement à sa sœur et à leur lignée. Elle avait pris le visage de ma seule tante à avoir changé de continent, de Terre. Je découvrais aussi que celle qui abuse est elle-même celle qui est abusée ! Elle se maltraitait elle-même incapable de dépasser la souffrance qu’elle portait. La mère portait cette merde qu’elle n’arrivait pas à éliminer et qui la maintenait bloquée dans cette lutte interminable contre le masculin. Et par extension, contre son propre masculin. On se tirait une balle dans le pied.

 

Quand elle était plus jeune, Lylia ne parvenait pas à faire ses selles la journée. Mais dès qu’elle s’endormait, son corps éjectait ce qu’elle retenait. Nuit après nuit, je me réveillais pour la laver, pour tout nettoyer et j’avais fini par m’écrouler en larmes devant cette situation que je ne parvenais pas à corriger. Ce symptôme avait disparu quand j’avais enfin compris ce qu’elle me montrait : il y a une mémoire lourde et dense que nous retenons malgré nous et qui n’arrive à s’exprimer que dans l’inconscient.

 

Un matin, alors que je nettoyais le toit, j’avais pressenti la présence d’un scorpion sous quelques affaires. Or, ce jour-là, Anas était absent et j’étais forcée de m’en occuper. Je l’avais bombardé d’insecticide pour le faire sortir de sa cachette, mais par la suite, j’avais juste assisté à sa lente agonie. Il étouffait, souffrait, se tortillait dans tous les sens et j’étais incapable d’abréger son supplice parce que j’étais bloquée par la peur.

 

Voilà le double aspect arachnide. J’avais peur de faire face à l’Amasutum à cause de la lourde mémoire qu’elle avait engrammée. Le venin qu’elle portait pouvait indiquer l’ancienne souche d’Amasutum qui fut éradiquée lors de la grande guerre, ou simplement le caractère venimeux de cette mémoire. Et pour décharger la mère araignée de sa hargne, il m’avait fallu pleurer et libérer la fille araignée de sa douleur.

 

Je comprenais enfin pourquoi la sœur de Anas m’avait déclaré : tu ne me considères pas comme ta sœur ! La sœur qui faisait souffrir le masculin (الشقيقة), l’araignée qui lors de notre premier contact s’était présentée comme une sœur, elle exigeait que je la reconnaisse en tant qu’une manifestation de notre âme et que je cesse de la rejeter.

 

La fenêtre m’apportait aussi une seconde information. Dans un autre rêve, j’avais rencontré un alter soldat. Il était debout face à une fenêtre qu’il ne quittait pas des yeux. Au-delà, je voyais la guerre qui faisait toujours rage. Pour ce soldat, notre rencontre était juste un bref instant de répit avant de retourner sur le champ de bataille. Il n’avait pas conscience qu’il était mort (du sang entachait sa poitrine) et il n’envisageait même pas la possibilité de ne pas y retourner.

 

Ainsi, avec toutes les femmes dans mon salon (sale-en soi, la merde), nous étions bloquées comme ce soldat. La fenêtre que je ne quittais pas des yeux menait à cette réalité souffrante, à ce passé auquel j’étais toujours liée par cet émotionnel refoulé. Et à chaque fois que les prédateurs l’activaient, ce passé était projeté dans mon présent. Dissociée, je niais le poids que je portais (douleur, tristesse, colère, culpabilité) et je réagissais par un comportement prédateur envers le masculin. Je revêtais alors le masque de l’araignée guerrière, je conduisais la voiture de mes sœurs, les Amasutum SDS en lutte contre le masculin, à me battre avec acharnement contre Anas. Ainsi, je générais mon quota d’énergie lourde et en plus, par mon comportement, je forçais mon entourage à nourrir le canal de prédation.

 

J’assistais alors au rêve suivant dans lequel le poids-nié a été libéré :

 

« Je suis sur une plage. J’entre dans des toilettes. À un moment, le sable qui recouvrait tout est soufflé. Je découvre un tas d’excréments. Un saut rempli d’eau apparaît. Je verse l’eau sur les selles et tout disparaît en bas. Ça se débouche. Je sais que l’eau et le sable vont tout métaboliser. »

 

Dans le texte 15-la gardienne amie, j’avais partagé un rêve que je n’avais pas compris à ce moment :

 

« Je suis avec Anas, face à nous se présente l’Amasutum que je ne perçois pas comme une reptilienne, mais comme un feu alchimique. Je lui tends la main et l’invite à passer à travers moi. Elle refuse et veut passer par Anas. J’ai beau insister, elle glisse vers le bras d’Anas. »

 

L’Amasutum est celle qui fait naître le feu, un feu alchimique qui permet de transmuter les mémoires en Connaissance. Je savais qu’en passant à travers mon masculin, elle risquait de réveiller ce qui était refoulé et je n’étais pas sûre que nous pouvions y faire face. En plus, en passant par le masculin, il semblerait qu’elle ait rétabli la fonction père.

 

Cette fonction appelée également la loi du père est le NON du père qui vient couper l’unité mère-enfant, pour que l’enfant ne soit plus une extension de sa mère et qu’il puisse s’individualiser. Cependant, celle qui introduit et laisse la place à cette fonction du père symbolique est la mère. Si elle le dénigre, ne le reconnaît pas, l’absence ou le rejet de cette fonction peut entraîner des psychoses par la suite. Dans la psyché de l’adulte, persiste cette unité. La mère nourricière revêt alors un caractère dévorant, celle qui protège devient celle qui étouffe…

 

Cette fonction père était inopérante chez moi. Il y a quelques années, mon père m’avait donné un Qanun. Je n’avais ouvert l’étui qu’une fois chez nous. J’avais découvert l’instrument brisé. Or le mot Qanun قانون en arabe désigne également : la loi. La loi transmise par le père était brisée !

 

En me disant de le lâcher, Anas avait dit NON au complexe araignée. Ce masculin s’était positionné devant celle qui le dénigrait au lieu de s’effacer. En me forçant à lui rendre sa place, en écoutant vraiment ce qu’il avait à dire, la fonction père a été rétablie permettant à la fille araignée de sortir de l’emprise de la mère araignée et ainsi s’individualiser.

 

Je pouvais alors laisser mourir ce qui devait mourir : ce passé, celle que nous avons été, il était temps que je reconnaisse et que je lâche cette loyauté qui n’était plus justifiée et qui ne faisait que me bloquer et me retarder. Et je pouvais laisser vivre ce qui devait vivre : le présent, celle que nous sommes maintenant, libérée de cette mémoire, elle peut aller à la rencontre du masculin et évoluer vers La Femme Sauvage.

 

La Femme sauvage est la femme qui en paix avec son animus (le masculin de la femme), aurait réussi à se libérer et à faire jaillir naturellement la force et la puissance intérieure et profonde de la Femme. (Wikipedia)

 

Après tout, en plongeant avec la femme blonde au plus profond de nos émotions, près du sable et dans l’eau, elle m’amenait à métaboliser nos mémoires et initiait la rencontre avec le masculin.

 

Puis je me suis attardée sur certains points. Quand le gardien avait voulu s’en prendre à la gardienne présente en moi, la première chose que j’ai senti a été un attouchement anal. Par après, au moment où j’ai voulu faire sortir la sauterelle, l’araignée était sous la porte du garage, une autre expression qui désigne l’anus. En plus, la lourde mémoire était représentée par des selles retenues. Ces informations m’indiquaient que cette mémoire refoulée agissait comme un implant qui permettait aux gardiens de me localiser. En voulant éjecter le parasite qui ravageait mon intérieur, ils ont agité l’araignée sous mon nez parce qu’ils savaient que ma lutte contre elle allait accaparer toute mon attention et j’oublierai ma mission première.

 

Cette dernière donnée me renvoyait à un autre rêve :

 

« Ma mère compte faire un travail dans mon jardin intérieur. Elle désherbe quand elle tombe sur une mante humanoïde. Je lui dis : c’est mon prédateur personnel. Elle la jette. Cependant, la mante parvient à escalader le corps de ma mère, à se positionner entre ses deux yeux et à l’hypnotiser. Elle tire sur ses antennes et ma mère, qui n’en a pas, mime le même geste. »

 

Avant même que je ne fasse le lien entre l’araignée et l’Amasutum, je m’étais demandée s’il ne s’agissait pas là d’êtres insectoïdes que mon cerveau s’amusait à me représenter sous différentes formes. Grâce à un autre rêve, j’avais compris que je faisais face à deux entités distinctes :

 

« Je vois l’entité Mantidae comme une image et j’ai en dessous une lecture de son ADN. Son génome est composé de gènes de mante religieuse, de sauterelle et de fourmi. »

 

Et cette mante/sauterelle/fourmi parvenait à hypnotiser la mère. Se pourrait-il que sous l’emprise de l’entité sauterelle, l’Amasutum dissociée dégageait le comportement d’un prédateur insectoïde ? Se pourrait-il qu’à chaque fois que l’Amasutum parvenait à toucher sa douleur, ce Baba (être sauterelle) intervenait et l’endormait (injection) pour l’empêcher de traiter cette mémoire ?

 

« Je vois un scorpion à mes pieds et je panique. Anas écrase sa queue porteuse du venin. Le scorpion reste vivant et ressemble à une araignée dont l’intérieur est tout vert (Amasutum ?). En reculant, je renverse un sac d’où se déverse une nuée de sauterelles. Ce sac appartient à mon grand-père paternel qui se précipite, rassemble les sauterelles et les cache dans son sac. »

 

Ainsi, il semblerait que le mari dont l’espace est infesté de sauterelles, l’ancêtre emprisonné et ce grand-père, soient les représentations de ce masculin porteur des sauterelles. Pour le moment, je n’ai pas les informations suffisantes ou le recul nécessaire pour répondre aux questions qui restent posées. La suite de l’expérience révélera peut-être ce que nous ne voyons pas pour l’instant et nous permettra de comprendre enfin la pleine signification du marché conclu par la gardienne.

 

 

Conclusion :

 

Après cette expérience, Lylia toute joyeuse m’a apporté son petit miroir que nous avions monté toutes les deux, mais qui s’était révélé flou. Il ne reflétait pas grand-chose. Or, ce matin-là, Anas l’avait trouvé et avait enlevé un film qui était sur la surface. Et dire que depuis toutes ces années, je n’avais pas envisagé la possibilité qu’il y ait un filtre dessus. Le masculin venait éclaircir notre perception.

 

L’écriture de ce texte a été un vrai travail intérieur. À maintes reprises, j’avais tenté de récapituler l’expérience sans succès. Quand je n’utilisais que mon côté masculin, le texte était bien structuré, mais n’était pas habité. Quand je ressentais le sens qui voulait s’exprimer, l’écriture devenait un bazar de phrases alambiquées. C’est seulement en apprenant à me laisser porter par mes deux côtés, masculin et féminin, que l’expression s’est révélée un peu plus harmonieuse.

 

Cette expérience m’a forcée à lâcher ce que je crois savoir, à dépasser les doutes, à puiser dans mon intuition profonde et surtout à me fier pleinement à celle qui m’habite. L’initiation douloureuse de l’As, de l’araignée, m’a amenée à dépasser mon rejet, ma peur et à traverser l’ombre pour découvrir qui se cachait derrière. Je tombais alors sur l’A-As, la source unique, l’essence Amasutum. Cette essence qui a pris tant de formes et qui aujourd’hui nous amène à interagir avec nous-même à travers et au-delà de l’espace et du temps.

 

Pour conclure, je partage cet extrait du livre Femmes qui courent avec les loups :

 

« Les larmes sont une rivière qui conduit quelque part. Elles entourent de leur flot le bateau qui emporte la vie de notre âme, viennent le soulever et l’entraîner hors des rochers, hors du terrain sec, vers un lieu nouveau, un endroit meilleur.

Il y a des océans de larmes que les femmes n’ont jamais versées, car on les a habituées à emporter dans la tombe les secrets de leurs parents, les secrets des hommes, les secrets de la société et les leurs propres. Ces larmes sont considérées comme dangereuses, car elles poussent les verrous qui défendent les secrets des femmes. Pourtant, en vérité, mieux vaut qu’elles pleurent, pour leur âme sauvage »

 

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