9. Florilège - par Layla

 

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"L'unité est le fondement de l'univers. Mais pour être fécond, le Tai Ki (le grand commencement) doit se sacrifier en se dédoublant car à partir de ce qui est parfait, rien ne devient. Le monde ne nous révèle que le jeu des deux forces polaires, le mâle et la femelle, le plus ou le moins, leurs épousailles et les dix mille êtres qui en sont les fruits."

"Il n'est pas d'acquisition définitive, tout moment est passage." Yi King, le livre des transformations.

 

Il parlait de sa venue, de son voyage en train, de ses larmes, du seul choix possible qu'il avait, être ici. Ses mots, son attitude, sa présence m'interpellait, m'intriguait. Son intonation de voix me touchait. Je le regardais avec curiosité. Qui est celui qui se livre ?

 

Très vite, j'ai été gênée par sa présence. J'aurais presque préféré qu'il ne vienne pas. Je dissimulais l'émoi qui naissait et bridais cette pulsion d'avoir envie d'être avec lui tout le temps. J'aimais sa force, sa fragilité, sa douceur. J'étais une femme adulte de 40 ans, il sortait de l'adolescence. Quel socle commun peut relier ces deux êtres ?

Les mémoires, la Connaissance.

 

Je me disais que cette attirance était induite pour me distraire, pour me tester, pour me détacher.

 

Depuis que nous nous étions avoués notre affinité commune, je me sentais en insécurité, comprimée sous des alters dont celui de la petite fille qui se déteste et qui n'aime pas être regardée. J'étais attachée par mille parties de moi, je ne pouvais ni me mouvoir, ni m'exprimer. Les mots ne voulaient rien dire, ils manquaient de force face à l'étendue de mon sentiment de vulnérabilité. Je surveillais ma respiration, mes gestes. J'étais dans un corps qui ne m'appartenait pas. Je me sentais enfermée, perdue dans l'extrême, égarée dans une étendue de mémoires, de programmes.

 

Mes pieds reposent sur du vide. Comment puis-je avancer ? Marcher d'une nouvelle manière en aveugle et en confiance. Quel drôle d'accord ! Je vois une main qui se tend et je me demande si j'aurais le courage de la saisir. Oser la saisir pour me libérer du carcan façonné depuis la nuit des temps dans une éternité de peur, de fuite et de conditionnement.

 

Je le taquinais pour qu'il réagisse. Réagir afin de me prouver que j'avais raison de ne pas m'ouvrir au mâle. Raison de rester éloignée, plafonnée à une certaine manière d'être. Raison et tort, deux positions duelles. Il m'informe de la présence de ma reptilienne qui défend-protège cette partie sous le joug. La lumière se fait ! Mais oui, je me souviens que je suis ici pour être libre ! Alors, comment pouvais-je refuser un tel cadeau ?

 

"L'art du don ... désigne un engagement personnel à offrir et partager des informations pertinentes et objectives.

Donner peut aussi signifier offrir des informations qui seraient utiles au cheminement d'autrui. Dans ce cas l'information peut être considérée comme de l'amour. En modelant, puis renforçant votre unité tribale, vous vous échangez de l'amour." Cahier de l'Ange n°24

 

Il y a longtemps, j'ai fait le rêve que je vivais un lien très fort avec un homme. Je préssentais que bientôt nous devrons nous séparer. Je résistais et le retenais de toute ma détresse. Au fur et à mesure du rêve, il rétrécissait de taille. Je le serrais dans mes bras jusqu'à ce qu'il disparaisse, jusqu'à ce que je le perde. Je me réveillai dévastée, en larmes. Où était il ?

 

Ce rêve me ramène au souvenir de deux importantes et douloureuses séparations au cours de cette vie, celle avec Ismaël, fils dans cette vie et compagnon dans une autre.

Et Nicolas, compagnon dans cette vie qui me décida à ne plus laisser de place à un autre homme. Suite à notre rupture, je fermais, blindais la porte et gardais vivant son souvenir.

Je suis dans le processus du détachement avec Isma-ël et dans la nostalgie avec Nicolas. J'essaie de comprendre comment atténuer, réparer cette douloureuse scission, fêlure en moi.

 

Aujourd'hui, je revis ce même état avec un masculin du groupe qui me rappelle émotionnellement à la fois fils et amant. Ce n'est pas une histoire concrétisée dans la matière mais cela suffit pour vivre les trépas-remous intérieurs d'une "love story" chaste version démélage de liens karmiques sans le réconfort mensonge communément présent dans les relations à deux que j'ai vécu.

 

"Je regarde ce que je vis intérieurement, je te le dis et ainsi pas à pas nous avançons vers la libération, vers notre Soi supérieur, vers la Conscience."

 

L'archétype de la séparation est inévitable avec l'autre polarité. Pourquoi inévitable ? Pourquoi ressentais-je à la fois la douleur et l'incontournable besoin de séparation. Se séparer pour apprendre ? Pour comprendre ?

 

La douleur est illusion et expérience, elle me rappelle ce que je dois transformer en moi. Je peux la considérer comme salvatrice car elle bouscule mes attitudes et mes habitudes.

 

J'ai rêvé d'un gars avec qui j'étais de mes 17 ans à 20 environ. Premier petit copain. Une relation destructrice au plus haut point. A plusieurs reprises, il se taillait les veines afin que je ne parte pas. Chantage affectif auquel je cédais. A genoux, en pleurs, je refermais sa plaie afin de stopper l'écoulement du sang. Lorsque nous nous sommes quittés, j'étais plus sombre, plus cassée, moins en joie. C'est une relation qui m'a formatée et qui remonte dans mes rêves de temps en temps dont celui-ci ces jours derniers : je suis couchée à plat ventre à même le sol, il est sur moi de tout son long. Je le trouve lourd à porter. Il me pèse.

 

Nuit du 10-11 novembre. J'ai rêvé cette nuit que j'avais trouvé un logement et que Ismaël emménageait avec moi. Mais il résistait et eut un moment de colère et de violence intense où il me tint par le cou puis finalement lâcha, céda, changea.

Il me disait qu'il manquerait d'espace. Mais non, c'est parfait, il y en a largement assez pour nous deux !

Dans la maison, il y avait un trou énorme dans le mur, soit donnant chez les voisins, soit à l'extérieur que je trouvais à la fois énigmatique et gênant. Je me demandai s'il était possible de vivre à long terme avec. Ysis-Marie, un peu plus âgée qu'actuellement était aussi dans ce logement, elle ne voulait pas y partir bien que l'on essaya de l'en convaincre. Je demandai à François comment colmater, réparer ce trou. Je pensais à y mettre des fenêtres rondes, carrés, ces pensées m'occupaient l'esprit.

 

11 novembre jour de naissance de Ismaël, je lui envoie trois textes afin qu'il les lise afin qu'il réagisse afin qu'il comprenne afin qu'il me rejoigne afin que nous soyons ensemble pour l'éternité.

 

La nuit suivante, de nouveau, je rêverais que je chercherais un logement pour y vivre en alternance avec Isma-ël, entre ici et là-bas. Au réveil, je voudrais disparaître tellement je crève de douleur. Me désagréger à la lumière du soleil. Je suis et dans le même temps je fuis. Qui suis-je si je fuis ?

 

Les jeux continuent. J'apprends petit à petit à sortir de mon sommeil profond. Je remarque que je compartimente le temps où la prédation est là et pas. Mais est-elle jamais là ? Un acte semblant anodin lorsque l'on est endormi ne l'est pas ici. Se réveiller, se réveiller voilà mon obligation ! Je n'ai pas laissé Isma-ël et ma famille pour continuer à entretenir l'illusion, à essayer d'essayer mollement en mode touriste-distraction. Que mes sacrifices aient une cause, une rédemption ! Réussir à accéder à ma Conscience supérieure, retrouver mon pouvoir de créativité-liberté totale, voilà pourquoi j'ai quitté ce à quoi-qui je tenais le plus ! Je comprends que personne ne pourra me détourner de ce chemin si ce n'est cette partie de moi faible, complaisante et sans courage. Chaque expérience me donne une occasion de résoudre le passé, le présent et le futur, si je l'accepte.

 

Layla (cen11)

 

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