Récapitulation - 1ère partie - Par Muriel

 

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Il y a environ un an j’envoyais un témoignange (chaque fois que j’écris ce mot sur l’ordi je fais exactement la même faute de frappe... aujourd’hui je le laisse tel quel) sur une folle semaine, un parcours de petit Poucet avec des dents, des souris, un «nouveau message en attente» et des mémoires ou réminiscences liées à l’occupation nazie. C’était entre mi et fin août 2018.

 

J’étais très fière de ce texte, trop ! J’ai fait de l’auto-emballement médiatique, je devais donc sans tarder écrire une suite comme si TOUS les acteurs et lecteurs du réseau Léo n’attendaient que ça. Et tout ce que j’écrivais était à la hauteur de cette suffisance, surtout ce que j’avais compris (mais peu intégré et pas encore appliqué) de la relation mère/enfant. Donc j’écrivais, j’effaçais, je trouvais que tout était prétentieux et j’ai fini par laisser tomber un temps, au point d’oublier que je revenais ponctuellement noter quelques phrases pour ne pas oublier. Heureuse surprise quand j’ai entrepris la récapitulation de l’année écoulée.

 

Au début de septembre le chat de la maison s’est brusquement mis à avoir un drôle de comportement. Il ne voulait plus rentrer dans la maison et nous fuyait dès que nous l’approchions, tout en restant tout près, soit dans le jardin, soit sous la remorque près de l’entrée de la maison. L’alter «maman poule» s’active, en rusant avec sa nourriture j’ai pu l’approcher une ou deux fois et le prendre dans mes bras au moins pour m’assurer qu’il n’avait pas de blessures, d’infestations de puces ou autres parasites. Il s’est laissé faire «poliment» avant de sauter et s’éloigner. Il n’a rien de particulier, sa démarche est la même, et comme on lui a mis sa nourriture sous la remorque et sous la terrasse, j’ai pu constater qu’il se nourrissait bien. Que se passe-t-il alors ? Il a 11-12 ans, c’est la première fois qu’il agit de la sorte. C’est un chat qui vit dehors la plupart du temps mais dans un périmètre restreint, il a peur des voitures, des chiens et de certains autres chats du voisinage.

 

Pendant plusieurs jours je m’inquiète, me perd en suppositions, mais au final le constat est qu’il va bien, il ne veut plus rentrer à la maison pour le moment, c’est tout. Il me montre quelque chose, il a le même comportement avec Georges et Léo, mais je sens que le miroir m’est personnellement tendu. Encore l’histoire du détachement, celui que j’ai bien du mal à acter au quotidien avec Léo...et Georges, mais pas forcément avec le chat. En effet j’y fais attention, je veille à ce qu’il ait de la nourriture, de l’eau, je l’observe quand il semble aller moins bien mais je ne suis pas câline avec lui comme peuvent l’être Georges et Léo. C’est un accord tacite entre lui et moi depuis qu’on l’a adopté. Et là je m’angoisse, m’inquiète, presque culpabilise (de je ne sais quoi). Je condense en un temps restreint toute la palette des comportements d’attachement jusqu’à ce que je comprenne et que je le lâche, et que je conscientise qu’il me faut lâcher ce comportement avec Léo, mettre en marche ce lâcher prise, que difficile ne veut pas dire impossible. Le chat mettra plus d’un mois avant d’accepter de revenir dans la maison.

Plusieurs acteurs du réseau Léo témoignent de cette difficulté, notamment avec leur(s) enfant(s), face à cet enjeu majeur de laisser vivre à leur rythme les gens avec qui ils vivent, de leur laisser un vrai libre arbitre, ne pas faire d’ingérence. Je suis en «négociation» permanente avec cet alter qu’il serait plus juste de nommer «sauveur». Et d’ailleurs si des mémoires ou des archétypes de mémoires de victime ou de bourreau sont remontées à ma conscience, je ne me suis jamais penchée plus que ça sur celles de sauveur, il y a pourtant matière à travailler là…

 

Vers fin septembre j’ai une vision d’un lion qui dévore une lionne avec une pensée : «le lion (masculin) bouffe sa lionne (féminin)», il y a en moi le côté patriarcal, contrôlant, mental qui mange le côté féminin (l’intuition, le lâcher prise en douceur). Est-ce à relier avec les gènes aryens et sémites dont je suis porteuse et qui créent une dualité, une bagarre ? Est-ce que je n’ai pas déjà fait un choix ? J’en souris parce que la réponse fuse aussitôt, faire un choix c’est facile, le faire vivre au quotidien avec fermeté sans déni des émotions, avec une vigilance souple c’est épuisant pour moi. Je sens très bien le côté rigide, contrôlant et je culpabilise quand je me surprends dans de tels comportements. Je tourne en rond en même temps qu’une petite voix me dit que je nourris cet alter «sauveur maman poule» plus que je ne l’accepte tel qu’il est en lui signifiant que je le vois quand il se manifeste mais que je ne n’ai pas l’intention de lui laisser toute la place.

 

Mi Octobre je rêve d’un puma. J’arrive pour une fête dans un lieu fermé par de lourdes portes, les gens qui nous accueillent nous préviennent qu’il y a plein de félins différents en ce lieux, ils sont habitués aux humains donc pas dangereux mais il ne faut pas qu’ils s’échappent pour ne pas se faire capturer voire tuer. Je rentre donc pas très rassurée, plusieurs félins courent au milieu de nous, d’autres sont un peu en retrait, je n’ai rapidement plus peur, il n’y a aucun signe d’attaque en vue. Un puma vient a ma rencontre et saute sur mon dos pour s’enrouler autour de mes épaules, je trouve bizarre de ne sentir aucun poids alourdir ma marche , il ronronne près de mon oreille comme un gros chat et intérieurement j’entends «maman ?» sur un ton interrogatif deux ou trois fois (que j’ai ressenti dans ce rêve comme «est-ce que tu es bien ma mère ?»), je sais que c’est ce puma qui me parle. Il saute au sol et rejoint ses congénères quand j’arrive dans la maison. J’essaie d’expliquer ce qu’il vient de se passer et comment je sens qu’il y a un «message» dans cette expérience, mais tous les gens dans cette réunion festive rigolent, ne comprennent pas.

 

Ce rêve est en lien avec le chat et avec Léo, ce puma m’interroge sur ce statut de mère, je dirais qu’il me demande de m’interroger sur moi et cet alter auquel je me suis si intimement identifiée. Je comprends aussi qu’il ne suffit pas de mettre en lumière un alter de ceci ou de cela pour que «l’affaire soit classée» et qu’on puisse passer à autre chose avec la satisfaction d’avoir définitivement résolu un «problème»... j’aimerais tellement le croire et l’affirmer. Donc cet alter est là, puissant et puisant (épuisant) dans cet émotionnel de la maman qui s’identifie tellement à son rôle que ça déborde de partout y compris avec Georges, et même encore plus loin, j’en prendrai conscience plus tard. Je l’ai vu, reconnu, accueilli mais ça ne suffit pas. Il me faut me désidentifier de ce rôle, tous les jours faire acte de vigilance.

 

[je fais un aparté: nous sommes le 25 juillet après midi quand je mets en forme cette partie là du texte. Depuis le début de la semaine il fait une chaleur écrasante et tout est fermé dans la maison pour tenter de garder un semblant de fraîcheur. Je sors sur la terrasse un moment et je vois un gros nuage se former au loin, il y a un vent chaud et ce nuage évolue vite mais j’ai le temps d’observer sa forme qui me laisse abasourdie. Au milieu du nuage il y a distinctement un profil de jeune homme face à un profil de jeune lion (petite crinière), au bout du nuage derrière le jeune lion, tourné vers l’extérieur, un profil de femme qui crie ou pleure, et à l’autre bout derrière le profil du jeune homme, également tourné vers l’extérieur, il y a celui d’un cochon (je le relie avec le signe astrologique chinois de Georges: le cochon), Petit à petit les profils du jeune homme et du jeune lion fusionnent, celui de la femme qui crie devient plus petit et sa bouche se ferme, tandis que celui du cochon reste tel quel. Donc au milieu Léo face à un jeune lion (un alter, sa partie léonine ?), derrière le félin moi (l’alter ?) qui crie ou pleure, et derrière Léo, Georges (une représentation de lui ?) imperturbable. Nous sommes fin juillet, beaucoup de choses se sont passées, c’est tellement parlant…Georges en tant que père n’a pas toutes ces peurs qui me parasitent, Léo prend les infos, consciemment, inconsciemment, on ne se cache pas de lui pour parler de ce que l’on vit, et moi ou plutôt l’alter maman qui crie, a peur, puis se calme peu à peu. Enfin, c’est l’interprétation 1er degré, il y a sûrement d’autre choses à voir à différents degrés]

 

Vigilance, ce mot revient souvent dans mes pensées : «latin vigilantia, habitude de veiller, surveillance attentive, sans défaillance».

Dans vigilance il y a vigie: «matelot placé en observation dans la mâture ou à la proue d'un navire, synonyme : sentinelle, veilleur»

Et il s’agit bien de cela, prendre de la hauteur et veiller avec attention. Lancer sa capacité à détecter les signes, les attaques, les synchronicités, tout ce qui donne de l’info, en soi, autour de soi, attentivement, sans défaillir. Vigie-lance.

 

Décembre. Au dessus de la cheminée il y a un habillage en bois qui sert d’étagère sur laquelle il y a, entre autres bibelots, quatre petits cadres photo, un de mon père, un de Léo petit, un de moi avec Léo petit et un de mon père avec sa femme. ils sont juste posés. Depuis environ un mois les cadres se couchent régulièrement sur l’étagère, tantôt ceux où sont Léo, tantôt ceux où sont mon père. Ça n’est jamais arrivé...Personne n’y touche jamais. Je demande à Georges et Léo, ils n’avaient même pas vu qu’ils avaient bougé. Je les replace. Au bout de quelques jours ils retombent, toujours par deux, ceux avec Léo ou ceux avec mon père. Mystère. Je tente de comprendre. Mon père et sa femme représentent l’ancien, les anciens schémas de fonctionnement du couple, de la famille. Léo et moi, bien que je sois encore tiraillée entre «deux mondes» peuvent représenter le nouveau , une autre façon de voir la «famille» et donc le «couple», de communiquer, les remises en question.

 

Je sens que ce n’est pas complet comme explication, je me suis même demandée si mon père (mort depuis 2 ans 1/2) n’essaie pas de me faire signe, mais j’écarte l’idée. Depuis sa mort, il ne me manque pas, je ne l’ai jamais «appelé» ni même rêvé de lui. Pourtant les cadres cesseront de bouger vers la fin de l’année. Je me dis que j’ai donc capté «le message», mais il me reste quand même un goût d’inachevé dans cette compréhension.

 

Pendant toute cette période et même après il y a une grosse difficulté de communication avec Georges, j’ai toujours la sensation qu’il ne se sent pas vraiment concerné par ce que j’aimerais partager avec lui. Il lit les cahiers, il a fini les dialogues certes mais quand on en parle ensemble ça reste évasif de son côté. Et donc je m’agace, il se braque, et de plus en plus souvent je me réfugie dans un mutisme dans lequel je me sens évidement très mal. Il a les infos, il les prend avec intérêt intellectuellement , mais tout ça reste extérieur à lui. Et moi murée dans mon silence pour ne pas générer de disputes, Et murée dans mon statut de victime incomprise, je refuse de voir que je fais de l’ingérence, que je ne le laisse pas avancer à son rythme, et que je le bloque avec des réflexions tranchantes quand il tente une discussion que j’interprète comme polie, convenue, pour me faire plaisir. Et d’ailleurs me vient une question obsédante, qui sommes nous l’un pour l’autre, dans le sens de qu’avons nous comme mémoires communes ?

 

Début février les cadres photos recommencent à tomber, celui de mon père seul et celui de lui avec sa femme. En fait ceux où paraissent Léo ne tomberont plus jamais. Les cadres se couchent sur l’étagère même quand je suis dans la pièce, je ne les entends pas. Ça me laisse très perplexe. Au bout de quelques jours je les déplace, les intervertis avec d’autres objets... ça ne change rien ! Donc le père, le masculin d’un côté, et de l’autre le couple, le masculin et le féminin…

 

Février, on dirait que les choses s’accélèrent. Nous sommes invités à Bali au mariage d’un ami d’adolescence de Georges. Je lui dit clairement que je n’irai pas, j’ai une phobie de l’avion, je l’ai déjà pris mais là il s’agit de 24h aller et 24h retour en 2 ou 3 escales, trop pour moi. Et les cérémonies de mariage, baptême, truc et machin ne m’intéressent plus, même à Bali. Léo ne pourra pas, ce sera pendant les vacances scolaires de Pâques, il est en 1ère L, il a de grosses révisions pour le bac blanc en français, et comme il se sent bien depuis qu’il est dans ce lycée, il veut jouer le jeu. Georges décide d’y aller seul. Le soir où il fait des recherches pour son billet d’avion je me sens mal, je ne peux pas manger et je vais me coucher tôt.

 

Pourquoi ce malaise ? La première pensée qui m’est venue c’est comment je vais gérer le quotidien sans lui. Tiens c’est drôle, moi qui pensait faire une projection de ma phobie de l’avion sur lui, en fait je me retrouve dans la position d’une petite fille que son papa va «abandonner», et j’ai peur parce que je vais être seule avec Léo. Et si ma voiture tombe en panne, et si il y a un souci dans la maison, l’électricité, changer la bouteille de gaz de la cuisinière (ce que je sais faire, j’en rigole maintenant en l’écrivant), et si catastrophe par ci, et si catastrophe par là ? Et si nous avions une mémoire père/fille ??? J’y réfléchirai toute la journée du lendemain, et les cadres ne bougeront plus. Je prends ça pour une confirmation.

 

Muriel S

 

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Suite de la folle semaine et auto-embal
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