J’ai toujours rencontré des difficultés à communiquer, dire les choses. Ceci se manifestant plus fort depuis mon arrivée parmi les LEO, d’autant que la communication y tient une place fondamentale, je m’interrogeais : alors que je pouvais me sentir si enrichie par des échanges « vrais », pourquoi avais-je autant peur de communiquer, de m’exprimer ?
J’ai donc mené une enquête sur le sujet du secret. Les premiers éléments me furent donnés par une de mes sœurs à qui j’avais un jour demandé : comment était-ce lorsque nous étions enfants, avec nos parents ? Étant de quinze ans mon aînée, elle se souvenait mieux que moi et put me révéler que nous avions peu de place pour exprimer ce que nous vivions : nous n’étions pas entendus dans nos « soucis d’enfants » parce que nos parents étaient coupés de leur émotionnel.
Je me suis alors rappelée d’un rêve : je suis à l’étage d’un magasin de meubles, traînant une grosse valise avec moi. Je m’arrête devant un meuble, décide de l’acheter, mais ne sais pas comment l’emporter car ma valise est encombrante ; en demandant à une vendeuse s’il y a un ascenseur, je prends conscience que le meuble en question est un « secret-taire » !
La traduction du mot en langage des oisons me saute aussitôt aux yeux. J’ai d’ailleurs travaillé plusieurs années comme secrétaire – occupant des postes où des clauses de confidentialité étaient en vigueur –, sans jamais m’apercevoir de ce que cachait ce mot… et à juste titre !
Le message derrière ce rêve est que je me charge d’un secret que je ne peux plus porter ; il m’empêche d’avancer.
De quel secret mon inconscient pouvait-il bien « parler » ?
L’une des réponses, que je n’accepterais de voir qu’après quelques mois, m’apparaissait maintenant évidente. Je taisais bien sûr un secret vis-à-vis de ma famille, celui des abus sexuels de mon frère sur moi et ma deuxième sœur. Certes, j’avais parlé à ma sœur aînée et à mes parents des abus dont j’avais été victime, puis écrit et publié un texte sur le réseau LEO (cf. texte Voir et accepter ma part victime) ; pourtant, la culpabilité et la non-responsabilisation étaient encore omniprésents en moi. Un échange avec le groupe me permit de conscientiser que n’ayant pas TOUT dévoilé à TOUTE ma famille, c’est-à-dire en incluant aussi mon frère et ma sœur, protagonistes du traumatisme, je restais prisonnière de ces souvenirs, attachée au passé par culpabilité et ne prenant pas mes responsabilités. Alors, j’acceptais de poser l’acte qui m’était proposé : celui d’écrire une lettre à toute ma famille et de la leur envoyer.
Le meuble nommé secrétaire sert d’ailleurs à écrire des correspondances !
Après plusieurs jours de travail, cette lettre partit à destination de chacun des membres de ma famille. Je traversais des vagues de peur, d’angoisse, de culpabilité et de honte. Qu’allaient-ils penser ? Comment allaient-ils réagir ? Surtout ma mère, allait-elle encaisser le choc, ou ne pas le supporter et choisir comme ses parents, le suicide ?
J’intégrais peu à peu que la réaction des uns et des autres ne m’appartenait pas, ni n’était de ma responsabilité, que je n’avais pas à « les porter ». C’était une épreuve de détachement. Et au fur et à mesure que la culpabilité vis-à-vis de ce traumatisme se délitait et que je reprenais ma part de responsabilité, c’est-à-dire d’avoir attiré cette expérience dans ma vie et de l’avoir vécue comme je l’avais vécue, je sentais une force prendre place dans mon intériorité, une force qui s’élevait pour cesser de taire les secrets.
En parallèle, je continuai à récapituler sur mes comportements de « taiseuse ».
Dans ma famille, devenue adulte, il était resté difficile de communiquer sans peur et de façon spontanée. Pour organiser des moments en famille, nous avions souvent des désaccords parce que les messages ne passaient pas bien entre les uns et les autres.
Avec mes amis ou compagnons, j’étais très souvent prise par les inquiétudes : « qu’est-ce que je vais bien pouvoir dire ? », car je n’avais « pas beaucoup de conversation », comme on dit. J’avais souvent peur de poser des questions, peur qui se manifestait par le fait de tourner et retourner la question dans ma tête avant d’oser – ou pas – la poser vraiment.
De plus, dans ma vie « pré-LEO », mon ex-compagnon était entré dans la Franc-Maçonnerie un an avant notre rencontre, milieu où bien sûr le secret n’est pas une denrée rare ! Et cerise sur le gâteau, il s’était lancé dans une carrière de gendarme : on ne peut pas dire que ce soit le milieu de la transparence. Il me montrait avec évidence ces parts de moi qui étaient dans le secret.
Aussi, pendant longtemps, à chaque fois qu’il me fallait m’inscrire sur un site internet, je donnais une adresse mail dans laquelle ni mon nom ni mon prénom n’apparaissaient : je redoutais en effet que mon identité ne soit usurpée, cherchant donc à rester « invisible ». Cela m’a rappelée qu’adolescente, mes parents m’avaient offert un livre pour apprendre différentes manières d’écrire en langage codé. Ce sont des signes d’une communication qui veut rester voilée, compréhensible uniquement par des « initiés » !
En 2019, alors que j’attendais à un arrêt de bus, un homme s’arrêta près de moi et raconta au téléphone qu’il avait eu la voix coupée sous le choc de la découverte, dans l’hôtel où il logeait, d’un client qui s’était pendu…
Or, il faut savoir que mes grands-parents maternels se sont suicidés par pendaison. La corde au cou ! Cela indiquerait un blocage au niveau de la communication, et comme me le démontra l’histoire de l’hôtel, cela vaut autant pour le suicidé que pour la personne qui le découvre.
Par ailleurs, le chat qui vivait chez mes parents n’a-t-il pas été euthanasié parce qu’il était trop souffrant de la gorge ? Un animal de compagnie pourrait en effet « s’imprégner » des problématiques de ses maîtres et donc, être un parfait miroir pour ces derniers !
Cela me fit comprendre que la gorge, symbole et centre énergétique de la communication, était le siège d’un blocage traumatique dans ma lignée.
Tous ces éléments sont autant de signes que quelque chose m’habitait autour du secret, du fait de (devoir) se taire. La suite des événements va m’amener sur la piste incroyable d’une mémoire du XIVe siècle.
Alors que je reprenais mon arbre généalogique, mon regard se porta à nouveau sur l’étonnante résonance que je ressens avec mon arrière-grand-mère maternelle, Blanche : née en 1896, morte en 1968 – et moi-même née en 1986. Nos deux prénoms se font également écho, puisque « Candice » est issu du latin « candidus », signifiant « blanc ».
Je cherchai à comprendre plus loin. Déjà, il y a cette histoire d’avortement : Blanche aurait été faiseuse d’anges. D’ailleurs, son deuxième prénom et celui de l’une de ses filles portent le mot « ange » (Angélina, Solange). Lisant un site internet dénonçant la pratique de l’avortement, je vis émerger en moi la lutte « anti » et « pro » : deux alter aux points de vue opposés.
Je compris la peur panique, voire obsessive, que j'avais toujours eu de tomber enceinte : Blanche, avorteuse ou avortée, me fit remonter une mémoire transgénérationnelle où une femme avait choisi de ne pas garder le bébé qui grandissait en elle, et où la décision n’avait pas été assumée pleinement car la culpabilité s’y était immiscée, du côté de la mère et/ou du côté de celle qui l’avait aidée. Et bien évidemment, avorter à l’époque de mon arrière-grand-mère, c’était interdit, criminel, alors, cela se faisait en secret ! C’était ce secret, justement, qui venait renforcer la culpabilité d’une mère et d’une faiseuse d’anges.
Mes recherches sur le sujet firent souvent émerger le nom de Marie-Louise Giraud, guillotinée en 1943, pour avoir avorté clandestinement 27 femmes, dont l’une d’elle est décédée de septicémie. Et cette référence eut finalement son importance, puisque dans le même temps, Sand reçut un message téléphonique d’une voix d’outre-tombe, celle de sa grand-mère, du nom de Marie-Louise ! Cette synchronicité me montrait qu’il s’agissait bien d’une histoire de faiseuse d’anges, et de secrets dont le dévoilement fait payer de sa vie.
Alors que j’étais en train de penser aux situations qu’avait pu connaître Blanche, la poche de viande que je me préparais à faire cuire s’ouvrit en répandant une mare de sang sur la gazinière blanche…
Enquêtant sur la signification des prénoms, je fis de nouvelles découvertes sur celui de Blanche.
Les premières occurrences de ce prénom apparurent dans la famille royale de Navarre en Espagne, au XIIe siècle. Il fut ensuite porté par de nombreuses femmes de l’Histoire. J’appris notamment qu’une certaine Blanche était en lien avec Philippe Le Bel, le roi inquisiteur des Cathares, et découvris alors l’histoire de Blanche de Bourgogne et l’Affaire de la Tour de Nesle.
Des premières résonances entre elle et moi se révélèrent à travers certaines dates : Blanche de Bourgogne épousa Charles, fils du roi Philippe le Bel, en 1308 – je suis née un 31/08. Son mariage fut annulé le 19 mai 1322 – le 19 mai est la date de mon départ à l’étranger.
J’ai par ailleurs compris quelques semaines avant cette enquête que j’avais un alter nonne : depuis mon arrivée à Albières, mes choix vestimentaires se portent sur des vêtements très sobres, pour passer le plus possible inaperçue. Mal à l’aise avec mon corps et prise d’anxiété dès que je perçois des jeunes gens s’habiller avec séduction, que ne découvris-je pas de Blanche de Bourgogne ? Elle qui était jeune, coquette et très séductrice, passera 8 ans en prison pour adultère, puis 4 ans dans un couvent où elle finira ses jours !
Quand un alter exprima en criant à mon encontre, par la bouche d’une autre personne : « tu es une putain de séductrice ! », je compris que j’étais bien en train de remonter une mémoire, celle de cette Blanche qui, séductrice affichée croyant pouvoir profiter librement de sa jeunesse et des « plaisirs de la vie », s’était rendue coupable d’infidélité, causant la mort horrible de son amant, et contrainte à la chasteté pour près de la moitié de sa vie.
Dans la peau de mon alter, je ne comprenais pas ces conséquences excessives. Je tombais alors sur un article détaillant le contexte dans lequel évoluaient Blanche et ses deux compagnes.
Elle, sa sœur Jeanne et leur cousine Marguerite furent les jeunes épouses des fils de Philippe le Bel ; elles ne se préoccupaient guère des règles de la Cour, et leur insouciance et leur gaieté dérangeaient les courtisans. Ce furent les prétextes à des rumeurs sulfureuses sur leur débauche, qui s’amplifiaient sournoisement dans l’ombre de l’entourage royal.
Lorsque, après plusieurs années, les preuves de leurs infidélités tombèrent, la nouvelle se répandit comme une traînée de poudre, déformée et exagérée par le bouche-à-oreille et les rancœurs, salissant par là même la réputation et la crédibilité de la couronne, et mettant en doute la légitimité des héritiers. Il ne s’agissait plus d’une « simple » affaire d’adultère, mais d’un scandale politique, ébranlant jusqu’à la dynastie. Les châtiments infligés aux cousines et à leurs amants, sur ordre du roi, furent donc impitoyables, pour servir d’exemple et taire la calomnie.
(voir https://historyweb.fr/scandale-de-la-tour-de-nesle/)
C’est ainsi que mon alter compris pourquoi la réponse à sa « faute » fut si cinglante et violente ; je l’informais qu’il était responsable de ses actes, mais pas des rumeurs ni de la réaction de son entourage.
La culpabilité que je ressentais en étant « habitée » par Blanche de Bourgogne a ainsi pu s’étioler, permettant au processus de libération de se faire.
Ainsi, le fort programme de culpabilité que je portais, la peur des hommes et des relations sexuelles, l’angoisse de séduire et le rejet catégorique de toute infidélité de ma part, trouvaient des explications au-delà de ma vie présente, sur une autre ligne temporelle où les conséquences avaient été traumatisantes. Et bien évidemment, quand Blanche et ses compagnes fréquentaient leurs amants, il s’agissait là encore de garder un secret (celui de leurs tromperies) ! Quand cela fut dévoilé, les conséquences terribles n’ont-elles pas laissé croire qu’un secret vaut mieux d’être gardé ?
Je comprends ainsi mieux mon angoisse à l’idée de parler du secret dans ma vie présente, et comment le programme ancré notamment par cette mémoire pouvait alimenter mon prédateur : si je n’avais pas dépassé la culpabilité et pris la responsabilité de mes actes, le secret, et toute l’énergie qu’il nécessite pour être gardé, feraient encore des ravages, et la joie de la prédation – me maintenant prisonnière comme Blanche de Navarre.
Petit clin d’œil de mon Soi : j’ai été guidée à habiter aujourd’hui dans une impasse, un « cul-de-sac » ! Autrement dit, « le fond du sac », c’est-à-dire ce qu’une affaire a de plus secret ! Et « vider son sac », c’est avouer des choses tenues cachées jusque-là…
Parler de mon secret le plus « proche », c’est-à-dire celui dans cette vie-ci, en traversant les peurs et la culpabilité, était donc la clé pour ouvrir la porte et pouvoir « remonter le temps » vers d’autres secrets, dans d’autres vies. Ainsi, je peux progresser dans la résolution karmique et la libération de mon âme. En dénouant les mémoires qui entravent une communication vraie, je permets à l’information de circuler en moi et en dehors de moi, m’offrant de développer mon potentiel de Service d’autrui.
Cela me demande encore des efforts au quotidien pour ne pas taire ce que je ressens, révéler les secrets et dépasser les non-dits : la véritable libération de mes blocages implique que je ré-acte, dès qu’une situation se présente, dans le sens de la nouvelle réalité que je cherche à créer, en déjouant mes anciens réflexes et la prédation qui ne veut pas que je me déprogramme.
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